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Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em

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MessageSujet: Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em EmptyMar 2 Avr - 9:23

~ Don't wake me,
'cause I don't wanna leave
this dream
~



Le réveil n'avait pas eu besoin de sonner pour que Joshua ouvre les yeux. Il avait passé plus une heure à se tourner et se retourner, tentant de retrouver le sommeil, en vain. Alors il s'était levé, un peu avant l'heure fatidique. Bientôt il se dirigerait vers son rendez-vous, puis aurait sa journée de libre. C'était souvent comme ça que se finissaient ses week-end: avec du boulot en plus. Il avait beau être l'être le plus invisible dans son travail, il fallait bien évidemment que son patron ne le retrouve pour des reportages stupides qui lui prenaient tout son temps. Et le jeune homme pourtant talentueux se retrouvait à devoir interviewer des propriétaires de poules de compétitions, comme si sa vie et son job n'étaient déjà pas assez minables. Il avait le plus petit bureau - un ancien placard - , se tapait les reportages les plus débiles et les moins intéressant et aucun de ses collègues n'arrivaient à se souvenir de son prénom. C'était pourtant pas si compliqué non? Apparemment si pourtant. Même son patron réussissait à se tromper. C'est ainsi qu'en arrivant au lieu de rendez vous, cravate proprement nouée et lunettes sur le nez, il se vit appeler Georges. Il passa outre, comme habitué, comme désabusé, comme fatigué. Il en entendait tout les jours de ces conneries, une de plus une de moins, rien ne le changeraient vraiment. Son père lui avait toujours apprit à travailler dur et toujours se donner à fond dans ce qu'il faisait, mais depuis quelques temps l'envie de tout saboter, tout foutre en l'air, lui trottait dans la tête. Il n'en avait pas le courage pourtant. Démissionner oui, mais pour aller où? Il préférait rester là, attendre encore un peu. Il n'avait de toute façon pas de raisons de changer de vies. Personne ne la partageait, pourquoi s'ennuyer? Il était bien dans sa routine, travaillant sans cesse et ne voyant personne. Il attendait simplement son heure. Et quand elle viendrait, il serait enfin lui même. Mais son heure n'arrivait toujours pas. Et il venait de fêter ses trente ans dans un motel miteux de la banlieue de Rockford, envoyé par son patron faire un autre de ses reportages assommants. Il en avait profité pour passer voir ses parents qu'il ne faisait que croiser une ou deux fois par ans désormais, puis était rentré sans un mot. Et il s'était remit à ses articles, comme si de rien n'était, comme si le temps n'avait jamais eu d'emprise sur lui. Après tout, qu'était-ce que trente ans pour un homme? L'âge de la maturité certes. Mais un âge encore jeune.

Il lui fallut pas moins de deux heures pour recueillir des propos cohérents de la part de l'homme qui semblait tout aussi perdu que lui, se demandant ce qu'ils pouvaient bien foutre. Et tout ce temps Joshua pensa à ses foutues études, à son foutu patron et à ce foutu journal dans lequel il pataugeait. Il avait vraiment besoin d'un verre. Se dirigeant vers un café, il se rappela de l'heure. Dix heure du matin, mauvaise idée que de boire maintenant. Alors il s'installa en terrasse sous le ciel bleu de printemps et commanda un café. La cigarette au bec il commença à observer les alentours, plus ennuyé qu'autre chose. De l'autre coté de la rue cependant une personne attira son attention. Un jeune garçon, brun, le bonnet sur la tête et le cahier sur les genoux. Ce n'était pas la première fois qu'il le voyait dans Chicago. La ville avait beau être grande, on faisait vite le tour de tout ces visages. Et si il se souvenait de celui-ci c'était parce qu'il l'avait déjà remarqué auparavant, et même plusieurs fois. Un gamin du quartier surement. Un gamin qu'il ne voyait jamais autrement qu'en train de dessiner. Plusieurs fois Gallagher s'était demandé ce qui pouvait bien égayer la créativité du garçon qui griffonnait à vive allure, comme prit d'une transe artistique. Puis un jour il l'avait vu le regarder, plusieurs fois. Comme maintenant d'ailleurs. Une folle idée traversa l'esprit de Joshua, qui s'imagina un instant être la raison de cette agitation. Mais il chassa l'idée, ce demandant bien en quoi il pouvait être intéressant comme modèle. Cependant plus son café refroidissait, plus l'impression d'être épié devenait forte, à tel point qu'après avoir payé son dut il se leva, et se dirigea vers le garçon. Celui-ci semblait jeune et avait un physique à faire craquer les filles. Le genre de gamin qu'il avait été. Souriant, plus curieux qu'autre chose, il rejoignit le garçon, lui posant la question qui lui brûlait les lèvres. « Je peux vous aider ? » La phrase, au lieu de sonner comme un reproche, eu une intonation amusée. Il s'était peu être trompé, ce n'était peu être pas lui que le garçon regardait, aussi il s'empressa d'entamer la conversation, soucieux de ne pas passer pour un débile mental « Je vous ai déjà vu n'est ce pas ? Vous êtes du quartier ? »


crédit: woodspoon


Dernière édition par T. Joshua Gallagher le Sam 6 Avr - 8:15, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em EmptyMar 2 Avr - 19:28

« Un grand Chai Tea Latte, merci. » Voilà en tout et pour tout les seuls mots qu'il avait pu dire depuis le matin même, sourire offert gracieusement par la maison. Des cours, il n'en avait pas aujourd'hui, et d'autres obligations non plus, à vrai dire. Son professeur de modèle vivant avait eu la délicatesse d'annuler son cours sans prévenir, ce qui l'avait gentiment amené à flâner dès le matin dans les rues de Chicago, sac en main, et mp3 dans les oreilles. Quoi de mieux qu'un peu de Radiohead pour déambuler tranquillement, sans se soucier du temps qui passe ? Rien, ou en tout cas Emil n'avait rien découvert de plus grisant. Lentement, il avait laissé ses pieds le guider sans vraiment porter attention à la direction qu'il empruntait, son regard se perdant presque par automatisme vers les hauteurs des bâtiments qui l'entouraient. Des briques, du ciment, des fleurs, et puis le ciel - un cocktail détonnant auquel il était habitué depuis longtemps. Chicago la grande, Chicago la bruyante, mais Chicago la vivante, également. Certes, elle n'a pas la même saveur que son Oxford natale, mais avec le temps, il a appris à s'y plaire, autant qu'on peut aimer se promener dans une ville que l'on se plaît à découvrir jour après jours. Sans s'en apercevoir, ses pieds l'avaient mené jusqu'au Starbucks le plus proche et, sans surprise, il s'y était dirigé, commandant la même boisson que d'ordinaire, avant de repartir vers l'extérieur, gobelet chaud en main, déjà impatient de profiter du temps qui s'étalait encore paresseusement devant lui. Debout dehors sans trop savoir quoi faire, il avait bu une gorgée de son thé -trop chaud-, soupiré en sentant son téléphone vibré -à cause d'un message venant de son opérateur, celui de la part de qui il recevait le plus de textos dans le mois-, manqué de se faire bousculer -par une bande d'idiots qui trouvait que porter des joggings sans forme était un signe de pouvoir- avant de finalement se décider à aller s'installer sur un des rares bancs installés près de l'enseigne.

Déposant son gobelet avec précaution sur les lattes de bois, il n'attendit pas avant de sortir son carnet de croquis de son sac, ainsi que son matériel de dessin de secours -à savoir un crayon, un critérium, et une gomme. Bien installé sur le banc, il disposait d'une bonne vue d'ensemble sur toute la rue, et presque autant de modèles et d'idées de dessin qui n'attendaient plus qu'à être croquées, ce qu'il s'empressa de commencer. Voitures, arbres, bâtiments, il les avait tous faits, tellement faits, qu'il se dirigeait presque d'instinct vers les visages et silhouettes des nombreuses personnes qui évoluaient dans la rue, parfaits inconnus ou au contraire ignorants qu'il avait déjà croisé quelques fois. Sans vraiment le remarquer, Emil s'installait régulièrement aux même endroits pour dessiner, ce qui faisait qu'il se retrouvait parfois avec les mêmes traits sur ses feuilles à quelques jours d'intervalle, un hasard qui le faisait toujours sourire. Il avait ses petits préférés, après tout, ces gens qu'il appréciait particulièrement dessiner, sans vraiment de raison apparente. Son colocataire en faisait partie, tout comme Judith, de sa classe, et comme de nombreux habitants de Chicago dont il ne connaissait ni le nom, ni l'origine. Parmi ceux-là figuraient ses meilleurs modèles, les "plus vrais" comme il se plaisait à le dire. Des gens naturels, car le plus souvent, ils ne remarquaient même pas l'attention de laquelle ils faisaient l'objet. Une situation, une main tendue, un sourire, une rencontre, il lui en fallait peu pour qu'il se décide à mettre sur papier ce qu'il voyait et, une fois n'est pas coutume, il se laissa bien vite absorber par sa tâche, buvant tout de même une gorgée de son thé entre deux coups de crayon. Ce n'est qu'au bout de quelques secondes qu'il reconnut l'homme qu'il était en train de griffonner, - ce qui ne l'empêcha pas de continuer, bien au contraire. Celui-là appartenait à ces silhouettes dont il ne se lassait pas, à quand bien même il en remplirait plusieurs carnets. Sa silhouette était agréable à dessiner et, sans s'embêter à le noter, il prenait un certain plaisir à observer ses traits, qu'il commençait à connaître presque par coeur. Il n'avait pu dessiner un portrait de lui qu'une rare fois et, généralement, ses autres croquis se résumaient à des vus plutôt éloignées, comme celle qu'il était en train de faire. Un café, une terrasse, une silhouette solitaire - rien qu'en elle-même, la scène dégageait quelque chose et, attrapant maladroitement son autre crayon sans quitte sa feuille des yeux, il se mit en tête de le peaufiner un peu plus, sans même plus prendre la peine de jeter un coup d'oeil au modèle, qui n'avait pas attendu la permission pour bouger.

« Je peux vous aider ? » Sans avoir besoin de l'élever, sa voix recouvrit la mélodie en sourdine qui se jouait dans ses oreilles et, écarquillant un peu les yeux, Emil releva la tête vers l'origine de ces quelques mots, notant au passage que la terrasse en face de lui était maintenant bien pleine, mais uniquement de silhouettes qu'il n'avait jamais croisées. Silencieux, il reconnut sans grandes difficultés le visage qui lui faisait face et, inconsciemment, il eut la fausse impression de voir son dessin prendre vie devant lui -impression totalement infondée puisque Joshua n'avait pas eu besoin d'attendre d'être dessiné pour exister. D'un geste gauche, il retira ses écouteurs d'une main, relevant la tête vers le grand blond qui affichait un léger sourire, probablement amusé par la situation, Emil n'aurait su le dire. « Je vous ai déjà vu n'est ce pas ? Vous êtes du quartier ? » Une affirmation qui ressemblait à une question tout comme vice-versa, et le jeune brun plissa légèrement les paupières avant d'y répondre. S'ils s'étaient déjà vus, la réponse était oui, indubitablement. Peut-être légèrement froissé de ne pas avoir été reconnu, il ne pouvait tout de même pas lui en vouloir, son visage n'étant pas de ceux qui marquaient définitivement les esprits. Ils n'avaient échangé que quelques mots après tout, quelques phrases autour de cette exposition organisée par sa classe de peinture et, vu la teneur de la discussion, Emil se doutait n'être qu'un visage parmi les nombreux autres qui peuplaient les journées du journaliste. Aussi, il acquiesca quelque peu, humectant inconsciemment ses lèvres avant de répondre enfin à sa réponse, léger sourire aux lèvres. « Nous nous sommes déjà croisés oui... Ecole d'art de Chicago, cours de peinture, je ne sais pas si vous resituez.... Vous êtes journaliste, non ? » Parce que si ce n'était pas le cas, Emil n'avait plus qu'à reprendre ses clics et ses clacs, et à aller s'enterrer plus loin -même si le brun était presque sûr qu'il ne se trompait pas. A défaut d'être un as pour retenir les prénoms, il retenait plutôt bien les visages, tellement qu'il ne se rappelait même plus comment le-dit journaliste s'était présenté. Galloway ? Gabranch ? Impossible de remettre le doigt dessus et, en parlant de doigts, un coup d'oeil vers ses mains lui rappela que son carnet de croquis était grand ouvert, affichant fièrement la silhouette grise de Joshua sur son papier à grain. Pris d'une bouffée d'embarras, il s'empressa de refermer son cahier, manquant d'envoyer valser son ipod ainsi que son gobelet bancal vers le macadam du trottoir. D'instinct, il releva les yeux vers le blond, se demandant s'il avait eu le temps de regarder ou pas. Même si dans l'absolu il n'avait aucune raison d'avoir honte, penser au fait que le journaliste avait certainement remarqué l'intérêt dont il faisait l'objet pour venir lui parler suffisait à l'ennuyer et, quelque part, à faire battre son coeur un peu plus vite. Que pouvait-il bien en penser, après tout ? Il n'avait pas l'air d'être en colère, ni même contrarié, mais qu'en savait-il ? « C'est... c'n'est pas fini. Et c'est loin d'être exceptionnel en plus. C'est juste... » Tout en parlant, il secouait la tête comme si, à la manière d'un enfant attrapé en train de voler un gâteau, il avait honte de ce qu'il était en train de faire -ou plutôt qu'il regrettait de s'être fait avoir de la sorte. Finalement il soupira légèrement, relevant à nouveau son visage vers Joshua, sans trop savoir où il voulait en venir. « Je n'm'attendais pas à être... surpris comme ça, en fait... On laisse généralement les "artistes" gribouiller dans leur coin, ici. » Un coup d'oeil lancé à la volée, pour désigner les passants qui pouvaient parsemer la rue. Son sourire n'avait même pas quitté ses lèvres, signe que, dans le fond, il ne regrettait pas vraiment sa venue. C'était simplement un coup du sort, une surprise à laquelle il ne s'attendait pas vraiment -bonne ou mauvaise, seul l'avenir pourra le dire.
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MessageSujet: Re: Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em EmptyMer 3 Avr - 13:55

~ Don't wake me,
'cause I don't wanna leave
this dream
~


La rencontre était atypique. Josh n'avait tout bonnement aucune idée de ce qu'il faisait devant ce jeune garçon. Il était comme intrigué, comme curieux. Alors il était venu, sans même réfléchir. Il se trouvait la par hasard, guidé par son corps. Une envie d’inattendue surement, une envie de surprise. Comme l'envie d'aborder le monde entier, de sourire aux passants et de s'ouvrir à la vie. Et c'était sur ce garçon que le sort l'avait jeté. Une sorte de hasard heureux. Il se sentait bête bien sur, mais en lui une voix lui confirmait son choix, lui rappelait qu'il avait eu raison de foncer. Sauf que maintenant il ne savait plus vraiment quoi dire. Il n'avait pas l'habitude d'aborder des gens, comme ça. Les seules personnes à qui il adressait la parole était ses amis, ses collègues, ses parents et ses rendez-vous pour le travail. Il n'était pas vraiment du genre à faire la fête, à sortir, à rencontrer du monde. Le style solitaire qui reste dans son appartement même les beaux jours, qui sait toute les nouveautés de la villes mais ne participes pas à la vie en communauté. Un garçon timide qui avait du mal à accepter cette situation. Un garçon timide parmi tant d'autres, qui lui aussi s'était retrouvé de nombreuses fois seuls sur des bancs, les oreillettes enfoncés, et le livre sur les genoux. Lui n'avait pas été artiste, il avait été curieux, simplement. Avide de savoirs qui ne lui servaient guère. Ses parents l'avaient toujours laissé faire ce qu'il souhaitait, et c'était ainsi qu'il avait refusé la bourse de l'école de médecine, celle de l'école de droit et qu'il était allé dans la filière journalisme. Et c'était comme ça qu'il s'était retrouvé à travailler dans un petit journal miteux que personne ne lisait, quand ses anciens camarades se retrouvaient à des postes prestigieux pour lesquels les gens comme lui étaient fait.

Il regarda le garçon lever les yeux et fut légèrement troublé par le regard de celui-ci. Un regard clair, surprit et gêné. Des yeux qui ne cachaient aucune émotion, chose rare dans cette époque ou les gens se cachaient sous de fausses apparences comme pour cacher leurs sentiments, comme pour se protéger d'ennuis invisibles. Le garçon retira ses écouteurs et le regarda, toujours troublé. Ce qui amusa que plus le journaliste, continuant à déblatérer en souriant. L'autre devait le prendre pour un fou, mais il était venu à l'instinct alors autant continuer dans ce sens. C'est après un léger moment de trouble que le garçon parla, d'une voix clair et tremblotante, presque déçu - ce qui n'était pas possible, bien sur. « Nous nous sommes déjà croisés oui... Ecole d'art de Chicago, cours de peinture, je ne sais pas si vous resituez.... Vous êtes journaliste, non ? » D'un coup l'image du cours parvint à l'esprit du plus vieux qui s'empressa de sourire, une main vers le garçon comme pour le pointer, comme pour mimer l'évidence. Bien sur qu'il s'en souvenait. La professeur un peu folle mais sympathique, l'odeur de peinture fraîche, les élèves, tous plus originaux les uns que les autres et les créations impressionnantes pour des gens aussi jeunes. Déjà des artistes, pas encore diplômé. Joshua se serait bien vu artiste lui aussi si il avait eu un quelconque talent. Mais son seul talent était les mots, alors il faisait avec. « Oui ! L'article sur l’exposition des élèves je me rappelle. J'avais interrogé plusieurs d'entre vous, ça me reviens en effet. Excusez moi, je vois tellement de visages tout les jours que j'ai du mal à tout me rappeler. Les noms me reviennent plus facilement. Mais il me semble que je vous vois souvent traîner dans le coin... » Il continua de dévisager le garçon, ne sachant plus trop quoi dire, hésitant entre s'enterrer sous le banc ou bien partir en courant. Il se sentait si stupide. Après un petit instant il baissa les yeux. Et c'est la qu'il le vit. Qu'il se vit plutôt. Le trait était fin, les détails présents, le rendu impressionnant. Ce qui laissa sans voix l'homme qui continua de regarder un instant, surprit d'être le centre d'une telle attention mais surtout d'un tel talent. L'autre sembla le remarquer puisqu'il ferma le cahier, comme gêné. « C'est... c'n'est pas fini. Et c'est loin d'être exceptionnel en plus. C'est juste... » Ces paroles sortirent Joshua de sa torpeur qui releva la tête, l'air toujours surprit, assez ébahit par le talent du garçon. Celui-ci semblait ne plus savoir où ce mettre. Il semblait encore plus jeune dans cette situation. Le journaliste laissa échapper son avis, retrouvant le sourire instantanément. « Ouaah... C'est impressionnant. C'est vous qui... ? Bien sur que c'est vous je viens de vous voir le faire... Vous dessinez souvent les passants ? C'est vraiment... » Il n'avait pas vraiment les mots. Il n'y connaissait rien en art. Et il ne s'était jamais vu aussi bien représenté. Il ne s'était jamais vu représenté auparavant tout court. « ... C'est vraiment très beau. » Il fit un sourire au garçon, plus appuyé que l'ancien, comme pour le rassurer. Le jeune homme semblait paniqué à l'idée de s'être fait prendre. Ce qui pourtant ne dérangeait pas Joshua, pour qui les artistes étaient des génies se servant de tout et de rien pour créer. « Je n'm'attendais pas à être... surpris comme ça, en fait... On laisse généralement les "artistes" gribouiller dans leur coin, ici. » « Si vous appelez ça gribouiller alors qu'est ce que ça doit être quand vous avez de véritables modèles. Je.. Je ne sais pas trop pourquoi je suis venu en faite. J'étais tout seul au café et je vous ai vu et... C'est pas la première fois, alors je me demandais si c'était moi que vous regardiez - ce qui est assez prétentieux d'ailleurs - et puis je suis venu, comme ça. Excusez moi pour le dérangement. » L'autre garçon n'avait pas cessé de sourire, ce qui attisa la curiosité du journaliste. Pourtant il fit signe au garçon et commença à s'éloigner, avant de se raviser, se tournant d'un bon. « Un café, ça vous tenterais ? Je pourrais vous poser des question comme ça non ? Mon boss est un crétin mais il me laisse faire ce que je veux en ce moment, alors autant parler de choses intéressantes ? » Et hop, un autre sourire en coin, à croire qu'il n'était plus qu'une machine programmée pour. On le prendrait pour un fou, mais au moins il ne serait pas obligé de se taper un unième interview de toiletteur pour chiens. Un artiste qui traquait ses modèles dans la nature l'enjouait bien plus. Il n'en rencontrait pas souvent. Et celui-ci avait quelque chose en plus. Quelque chose qui avait fait se lever l'homme. Homme qui avança légèrement vers le café avant de se tourner à nouveau, tendant la main. « J'ai oublié de me présenter. Je m'appelle Joshua. » Il n'avait pas donné son nom, l'autre n'en avait pas besoin. Il était de ces rencontres que l'on faisaient au détour d'un chemin et que l'on oubliait le lendemain non ? Après tout Chicago était grande, elle était imprévisible et secrète. Le monde se croisait sans se voir, se voyait sans se connaitre et se connaissait sans se comprendre. Les jeunes jouaient au basketball devant les fenêtres des vieilles dames qui râlaient après le facteur en retard, trop occupé à faire déjeuner ses enfants qui retournaient ensuite à l'école pour devenir des citoyens du monde, des pions parmi tant d'autres, des rouages de la société. Les petits étaient les futurs grands de demain, les journalistes des liens entre les sociétés et les artistes des vendeurs de rêves. Des artistes qu'on croisait puis qui se perdaient dans la multitude de têtes de Windy City.


crédit: woodspoon


Dernière édition par T. Joshua Gallagher le Sam 6 Avr - 8:15, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em EmptyJeu 4 Avr - 16:34

Il existait en ce monde bien des choses qu'Emil ne parvenait pas à expliquer, à quand bien même il tournait et retournait le problème dans tous les sens. Pourquoi le concierge en avait-il toujours après lui ? Pourquoi la bibliothécaire prenait-elle un malin plaisir à toujours mettre les étudiants dehors pour fermer un peu plus tôt ? Pourquoi les voitures roulaient-elles immanquablement dans les flaques d'eau ? Pourquoi le micro-ondes continuait-il à sonner même lorsque la porte était ouverte ? Pourquoi ce journaliste était-il aujourd'hui debout devant lui ? Et pourquoi s'en sentait-il aussi gêné que flatté ? A la dernière question, il pouvait trouvait un semblant de réponse, s'il prenait la peine d'y réfléchir. Expliquer pourquoi il se sentait comme attrapé sur le vif était inutile -on lui répétait bien assez souvent que voler les portraits des passants pouvait s'avérer dangereux-, mais essayer de deviner pourquoi il n'était pas encore parti se terrer dans un trou s'avérait bien plus intéressant -même si, à ce problème, il ne voyait qu'une seule solution. Pour ce qu'il en savait, le blond était un journaliste et, d'après ce qu'il avait pu en voir, il savait mettre les gens à l'aise lors de ses interviews, et qui plus est, il l'avait déjà rencontré par le passé. Ainsi, la certitude de ne pas avoir affaire à un fou furieux voulant lui refaire le portrait -sans mauvais jeu de mots- semblait avoir été suffisant pour ne pas déclencher chez lui une angoisse fulgurante ou, en tout cas, pour ne pas l'inquiéter outre mesure. A vrai dire, quelque part, il se sentait presque enchanté d'avoir été abordé de la sorte, même s'il était loin de pouvoir mettre des mots dessus, tout comme il était bien loin d'articuler d'innombrables phrases lourdes de sens. Ses mots sonnaient maladroitement dans ses oreilles, faisant transparaître l'embarras qu'il ne cherchait même pas réellement à cacher. Trop honnête pour son propre bien ? Probablement. Elevé dans une famille avide de perfection et de pouvoir, il avait toujours été ce petit mouton noir, ce garçon déconnecté qui préférait jouer avec les pinceaux plutôt qu'avec les mots. Son père s'affichait en haut d'une multinationale bien cotée, sa soeur rayonnait sur les bancs des avocats, et lui ? Lui se faisait tout petit, caché derrière de grandes toiles, perdu entre les feuilles de ses carnets. S'il avait suivi la voie que son père avait voulu tracer pour lui, il aurait continué le droit. A cette heure, il serait probablement en train d'écouter une conférence sur telle ou telle affaire marquante, de prendre des notes sur ce qui a permis à l'accusation de gagner le procès contre toute attente. Il vivrait au milieu d'innombrables livres de droit, et se forgerait une carapace froide et inébranlable qui lui permettrait de réussir dans ce monde de requins - mais Emil était loin d'être un requin. Mentir semblait parfois hors de sa portée, et ce n'était pas pour rien qu'il préférait fuir les sujets qui l'ennuyaient. Trop honnête, oui. Trop sincère et facilement impressionnable aussi. S'il était surpris, il sursautait. S'il était ennuyé, il grimaçait. Et s'il était content, il souriait. Un peu comme maintenant, à petite dose, tout de même.

Savoir qu'il ne s'était pas trompé au sujet du journaliste le rassurait un peu, tout comme il concevait parfaitement le fait de ne pas être apparu clairement dans son esprit dès le départ -et à vrai dire, le contraire l'aurait bien plus inquiété. L'exclamation du blond fit froncer légèrement ses sourcils, alors qu'un léger sourire continuait d'étirer ses lèvres. Une évidence à côté de laquelle il était passée, comme une image qui réapparaissait subitement dans son esprit, et il trouvait encore le moyen de s'excuser, ce pour quoi le plus jeune ne pouvait que secouer négativement la tête,comme pour lui montrer que ce n'était pas la peine de s'excuser pour si peu. Il était bien loin de marquer les esprits, bien plus du genre à passer inaperçu dans la foule, et cette réalité ne le dérangeait pas le moins du monde, bien au contraire. La popularité n'avait jamais été sa meilleure amie, et il était bien loin de s'encombrer à améliorer les choses, préférant plutôt être de ceux qui, discrets, peuvent se permettre d'apparaître et de disparaître comme ils l'entendent, bien à l'abri des projecteurs. Quel intérêt pour un voleur de visages d'être aussi visible qu'un éléphant dans une boutique de porcelaine ? Il était le silence d'une ruelle vide, le souffle de vent dans les buisson, le passant qu'on n'était plus vraiment sûr d'avoir aperçu ou pas - même le journaliste semblait être de cet avis, à en juger par ses paroles. Pourtant, avant même qu'il ait eu le temps d'ajouter quoi que ce soit, le présent fit un bon en avant, et ses doigts refermèrent son carnet encore grand ouvert, même si le blond avait parfaitement eu le temps de voir ce qu'il y dessinait, vu la suite de ses paroles. « Ouaah... C'est impressionnant. C'est vous qui... ? Bien sur que c'est vous je viens de vous voir le faire... Vous dessinez souvent les passants ? C'est vraiment... » Les mains posées sur son cahier fraîchement refermé, il n'osait relever la tête, à la fois profondément flatté et ennuyé. Il n'y avait aucun mal à dessiner les gens qu'on pouvait croiser dans la rue, non ? « ... C'est vraiment très beau. » Des compliments auxquels il n'était pas habitué, pas à propos de ces croquis que peu de personnes pouvaient voir. De son travail, il obtenait parfois quelques bons encouragements, deux ou trois conseils bien enrobés qui l'encourageaient à continuer sur sa voie, mais rarement des esclandres ou des compliments aussi appuyés. Ses professeurs étaient bien plus difficiles à satisfaire que le commun des mortels, et Emil était loin d'être un dieu invétéré du crayon -même s'il se débrouillait plutôt bien, il fallait l'avouer. Le pire, dans tout ça, c'est que le journaliste continuait sur sa lancée, visiblement soufflé d'être passé sous son crayon. « ... Si vous appelez ça gribouiller alors qu'est ce que ça doit être quand vous avez de véritables modèles. » Des mots, il n'en avait prononcé que bien peu en retour, parvenant tout de même à articuler un "merci" passablement gêné entre deux paroles du blond. Et puis, sans lui laisser le temps de respirer, la rencontre prit fin, et le rideau sembla prêt à tomber sur cette scène qui sortait un peu de son quotidien déambulatoire. « Je.. Je ne sais pas trop pourquoi je suis venu en faite. J'étais tout seul au café et je vous ai vu et... C'est pas la première fois, alors je me demandais si c'était moi que vous regardiez - ce qui est assez prétentieux d'ailleurs - et puis je suis venu, comme ça. Excusez moi pour le dérangement. » Prétentieux, mais passablement vrai, il venait d'en avoir la confirmation par lui-même, après tout. D'un geste de tête, Emil envoya plus loin ces nouvelles excuses qui n'avaient par lieu d'être, pas dans son monde en tout cas. « C'n'est pas... enfin il n'y a pas de quoi s'excuser. Vraiment. » Il salua le blond d'un signe de tête, étouffant un bref soupir alors que sa silhouette s'éloignait déjà, et attendit une ou deux brèves secondes avant de se détendre et de baisser les yeux vers son carnet.

« Un café, ça vous tenterait ? Je pourrais vous poser des question comme ça non ? Mon boss est un crétin mais il me laisse faire ce que je veux en ce moment, alors autant parler de choses intéressantes ? » Arrêté à mi-chemin, il releva directement les yeux vers lui, clignant une ou deux fois les yeux avant de lui répondre. Se faire approcher était une chose, se faire offrir un café en était une autre -même à des vues professionnelles- et Emil fixa le journaliste d'un air profondément surpris avant de pouvoir réussir à articuler quelques mots. « Euh je... oui, d'accord, pourquoi pas. » Inconsciemment, sa main passa à plusieurs reprises dans sa nuque, alors qu'il jetait un coup d'oeil à son gobelet vide de thé. Il n'avait aucune raison de décliner l'invitation, après tout, et le sourire en coin qui lui avait été gentiment adressé n'avait certainement pas contribué à ce qu'il accepte, non non. Attrapant rapidement ses crayons, il les fourra dans son sac, offrant le même sort à son carnet, avant de se relever, jetant son gobelet en passant à côté de la poubelle. Il n'avait jamais eu l'occasion de lire le moindre article du journaliste, hormis celui qui avait été rédigé sur son école, que leur professeur leur avait rapporté. A vrai dire, il ignorait même pour quel journal il travaillait, le nom lui étant bien trop rapidement sorti de la tête. Un quotidien de nouvelles, un journal plus branché ? Il n'en avait aucune idée. Vu l'allure du journaliste, il ne devait probablement pas travailler pour un chiffon sans réel contenu -quoique les apparences pouvaient se révéler bien trompeuses, il était bien placé pour le savoir. Tout en marchant, il réfléchissait vaguement à ce qui pouvait bien être intéressant dans le fait de passer son temps à dessiner ce qu'il voyait et ce qui, par extension, pouvait bien intéresser les gens qui liraient l'article, et manqua de rentrer dans le journaliste lorsque celui-ci se retourna de nouveau vers lui. « J'ai oublié de me présenter. Je m'appelle Joshua. » Un regard vers sa main, un autre vers son visage, et de nouveau le même manège. Hésitant un peu, il serra sa main dans la sienne, l'espace que quelques très brèves secondes. Son père lui avait toujours répété que les poignées de mains étaient la façon la plus importante pour un homme de montrer son pouvoir et son assurance -ce que, à en juger par sa poignée de main loin d'être exceptionnelle, Emil ne possédait pas vraiment. « Emil. » Un léger sourire, et il lâcha doucement sa main chaude pour laisser la sienne retourner jouer avec l'air frais. « C'est plutôt formel, la poignée de main, tout ça... » Plus une remarque personnelle plutôt qu'une affirmation, il étouffa un bref rire, avant de laisser ses pieds le guider de nouveau vers le café le plus proche. La terrasse s'était passablement remplie depuis le matin, même si de nombreuses tables étaient encore inoccupées. Marchant aux côtés du journaliste, il s'installa à une petite table plutôt en retrait, jetant un coup d'oeil aux quelques fleurs qui bordaient la terrasse pour cacher la rue qui s'étalait de l'autre côté alors qu'il s'asseyait sur une des chaises, posant sa besace à côté de lui. D'ici quelques minutes, une serveuse ne tarderait pas à arriver pour prendre leur commande mais, en attendant, il était loin d'être le plus attentif qui soit, préférant étudier le paysage plutôt que regarder son vis-à-vis dans le blanc des yeux sans savoir quoi dire. Pourtant, il finit par tourner les yeux vers lui, alors que son fidèle bonnet quittait le haut de sa tête pour finir quelque part dans sur son sac. « Je sais que c'est plutôt votre travail de poser les questions mais... vous travaillez pour quel genre de journal ? » Loin d'être critique, il était curieux de le savoir, tout comme il était curieux de savoir quel genre de lectorat pouvait bien lire ses articles. « Enfin je ne remets pas en doute ce que vous écrivez ou quoi que ce soit, mais les histoires d'artiste intéressent suffisamment les gens, pour que vous fassiez un article là-dessus ? Je ne sais pas s'il y a matière à captiver toute une foule avec ça. » De nouveau, il étouffa brièvement un rire, alors que sa main se perdait dans la base de ses cheveux, ne savant pas vraiment où se placer. Il n'était ni un chien sauveur d'enfants, ni même un de ces héros que les villes découvrent parfois au détour des rues et, même s'il possédait une image ni foncièrement bonne ni mauvaise de son travail, il doutait posséder la carrure nécessaire au fondement d'un article. Mais qu'en savait-il au fond ? Joshua l'avait approché sur un coup de tête, et lui-même l'avait suivi sans trop savoir pourquoi. Peut-être que quelque part, il n'était pas aussi insignifiant qu'il le pensait parfois, au moins aux yeux d'une personne.
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Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em Empty
MessageSujet: Re: Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em EmptyJeu 4 Avr - 21:52

~ Don't wake me,
'cause I don't wanna leave
this dream
~


Le dessin était beau. Il lui donnait un air mature, un air simple, un air vrai. Joshua, avec ce simple portrait, aurait presque pu se voir mieux qu'il ne se voyait; un homme simple sans charme ni quelconque intérêt. Le dessin rendait le bien meilleur et le mal pire. Pourtant il ne pouvait voir les points qui n'allaient pas tant le dessin semblait le faire rayonner. Il aurait pu croire que ce n'était pas lui, pas vraiment lui. Le garçon avait du talent, c'était indéniable. Il semblait aussi avoir une très forte timidité. Comme un écran entre lui et le monde. Il ne lui rappelait que trop bien l'adolescent qu'il avait été. Réservé, restant dans son coin et ne se mêlant pas au monde. Un garçon surement bien. Un garçon simplement dans son monde, un garçon qui semblait ne pas accepter les compliments, comme ci ceux-ci n'étaient que trop précieux. Ce qui renforça ce sentiment de réserve que Josh sentait chez lui. Une boule de timidité qui souriait toujours pourtant. Par politesse? Par amusement? Il devait surement rire de lui oui. Ou bien simplement par fierté. Le sourire heureux de celui qu'on félicite. Le sourire que Josh ne faisait pas vraiment souvent, à son grand dam. « C'n'est pas... enfin il n'y a pas de quoi s'excuser. Vraiment. » Cette simple phrase rassura Joshua qui commença à partir à ce moment, heureux de s'être levé. La vie était faite de rencontre, et parfois en provoquer quelques unes ne faisaient pas de mal. Même si il ne reverrait pas le garçon, au moins il pourrait dire "j'ai osé voir ce qu'il se passait. Et j'en suis revenu." Ce devait être le destin, cette force de la nature qui dans les romans du XIXe siècle emportait les héros à travers l'espace et le temps, sans que ceux-ci n'aient d'ambitions, d'envies. Cette force qui faisait avancer les gens sans foi, sans avenir et sans ambition. Cette force qui faisait bouger les petits, parce qu'il fallait bouger. Alors un jour un homme se mettait à bouger. Il allait sans réfléchir au chemin, sans fil d’Ariane. Il faisait ses erreurs, changeait d'avis, mais avançait. Toujours un pas devant l'autre, avide de surprises et de découvertes. Une existence consacré à la découverte d'un futur, d'un autre monde. Et Joshua avait foncé sans réfléchir, désireux de voir d'autres horizons. Il n'avait aucune idée de ce qui l'avait poussé à le faire - la curiosité sans doute. Quand bien même, il n'avait jamais eu auparavant conscience d'une telle curiosité, et d'une tel flegme. Usuellement il ne dérangeait personne, il n'insistait pas, il ne bougeait pas. Il n'allait pas voir les inconnus, point. Mais sans savoir pourquoi le garçon l'avait comme attiré. Chose stupide, d'ailleurs. Mais quelque chose avait poussé son instinct, alors il l'avait suivit. Comme si le garçon avait eu une sorte d'aura l'appelant, aura dont il n'aurait pas pu se détacher. Mais ce n'était qu'un étudiant à bonnet, pas de quoi faire tout un plat. Pourtant, Joshua ne pu se résoudre à lâcher l'affaire. Il devait être en train de devenir fou surement, mais un goût d'inachevé lui resta. Mettant ça sur le compte de sa curiosité maladive en raison de son emploi il osa inviter l'autre garçon, chose qu'il faisait rarement. Il n'invitait déjà pas les filles qui lui plaisaient, alors il se demandait pourquoi il se mettait à proposer des cafés à des inconnus. Sa collègue blonde qui l'appelait encore Joseph aurait pu être une bonne invitée pour un café. Mais c'était à peine si elle savait qu'il existait. Outre elle, il ne voyait quasiment jamais d'autres femmes, de nouvelles femmes. Les seules qu'il voyait réellement étaient sa mère et Jordan, son ex petite amie. Celle-ci, toujours très présente dans sa vie, était sa derrière véritable relation. Depuis il ne prenait pas le temps d'aborder des femmes. Et voilà qu'il se mettait à faire la causette aux étudiants. Il délirait surement.

Peu être délirait-il, mais l'étudiant en question avait accepté. Et voilà qu'il finirait en tête à tête avec l'artiste qui s'amusait à l'observer sous tout les traits, histoire de voir tout les détails de son visage. Cette idée étrange ne dérangea pourtant pas le journaliste qui se mit en marche avant de se tourner vers son invité. Celui-ci manqua de lui rentrer dedans, s'arrêtant à temps. La situation, plutôt incongrue, fit sourire le journaliste un peu plus encore. Timide, réservé et maladroit. Un vrai mini-lui. C'était peu être pour cela après tout, qu'il ne voulait pas laisser le garçon tranquille. Comme une envie d'en savoir plus, et de partager. La solitude lui pesait depuis trop longtemps, faire la conversation tel un Forrest Gump sur son banc lui était préférable à une autre journée devant sa télé. Il n'avait aucune histoire de guerres, de hippies, de ping-pong, de crevettes ou d'amour à raconter mais ce n'était pas grave. Il se contenterait d'écouter, et d'écrire. Il se décida vite. Un article sur le voleur de visage, sur cette communauté d'artistes invisibles qui croquaient le monde jour après jour, sur cette jeunesse qui arrivait au grand galop et que les générations d'avant tentaient d'oublier. Un article sur ce monde formaté dans lequel le présent n'avait pas d'avenir, ce monde dirigé par les vieux et qui ne laissait pas la place au jeunes pour s'exprimer. Joshua ne se considérait ni dans un camp ni dans l'autre. L'homme fraîchement trentenaire ne voyait en lui qu'un lien entre les deux, un pont entre ciel et terre qui permettait au deux camps de se comprendre, ou au moins de s'entendre un peu. Ces deux camps qu'il ne fréquentait qu'au détours de couloirs, de rues et de lignes. Rencontrer le jeune homme lui permettrait d'étudier cette société, et d'en savoir plus sur ce qui avait foiré dans sa propre jeunesse pour finir aussi seul.
« Emil. » Le prénom était original, le ton mal assuré. La poignée de main fut courte. Emil - puisque c'était son nom - ne semblait pas habitué. Comme les enfants quand ils se doivent de se présenter aux grandes personnes. « C'est plutôt formel, la poignée de main, tout ça... » « Oh oui je.. Désolé. Je dois être vieux avant l'heure. C'est qu'avec le boulot je prend de mauvaise habitudes. » Un léger rire sortit de sa bouche alors qu'il s'approchait du café. Il avait apprit de son patron que les poignées de mains démontraient le caractère de la personne, et que plus elle était forte, plus la personne était de qualité. Une véritable connerie, quand on voyait que le gros homme lui écrasait les phalanges à chaque fois et n'était capable de négocier pour que le journal évolue et ne devienne important dans la ville. Un imbécile avec des gros cigares et des goûts stupides en matière de rédacteurs en chefs. Aussi, le papier était devenu un véritable nid à conneries au fil du temps. Mais le boulot manquait, aussi il restait là. Il attendit la serveuse en silence, un peu gêné. Il ne savait pas vraiment par quoi commençait. Il avait trouvé le sujet du reportage, c'était déjà ça. Emil le sorti de sa rêverie. Au son de sa voix, Joshua releva la tête, découvrant le visage du garçon sans son bonnet. « Je sais que c'est plutôt votre travail de poser les questions mais... vous travaillez pour quel genre de journal ? Enfin je ne remets pas en doute ce que vous écrivez ou quoi que ce soit, mais les histoires d'artiste intéressent suffisamment les gens, pour que vous fassiez un article là-dessus ? Je ne sais pas s'il y a matière à captiver toute une foule avec ça. » Et voilà qu'il rigolait, d'un rire pas désagréable à écouter. Il avait raison de se moquer, et Jo' ne pu s'empêcher de sourire à ça remarque. « C'est un journal d'information, pas très connu. Le Chicago Reader, il y a plusieurs rédactions et je me suis retrouvé dans un placard à balai à l'étage des exilés après avoir refusé d'interviewer une femme otage dont l'enfant avait faillit être tué. Génial hein ? J'ai pas réussi à sortir du placard depuis, et c'est assez long. Du coup je suis habitué aux articles sur la nouvelle gagnante du bingo au club des vieux de Chicago, des trucs de ce genre. Ce dont le journal se doit de parler mais dont personne n'en a rien à foutre. Mais je ne souhaite pas captiver la foule. Si le monde me lit tant mieux, je fais plus ça par passion qu'autre chose. J'aimerais écrire un article sur les générations oubliés de notre époque, sur tout ces jeunes qui vivent la, juste devant nous et que personne ne voit jamais. Comme vous » Il adressa un sourire au garçon alors que la serveuse arriva, leur réclamant les commandes. Après avoir prit son habituel café et laissé Emil commander à son tour, il continua son explication. « J'aimerais écrire sur la créativité des nouvelles générations et leurs vies, ainsi que sur l'incompréhension qu'il y a entre les "jeunes" et les "vieux". Ce genre de questions ne vous dérangeraient pas j'espère ? Sinon dites le, il n'y a pas de problème la dedans. Je peux vous demandez votre âge ? » Il ne sortit pas ses affaires, ni même son enregistreur audio. Il ferait tout de mémoire. Il avait de toute façon envie de parler avec Emil, sans vraiment savoir pourquoi. Il était quasi certain de retenir toute ces paroles.



crédit: woodspoon


Dernière édition par T. Joshua Gallagher le Sam 6 Avr - 8:14, édité 1 fois
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Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em Empty
MessageSujet: Re: Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em EmptyVen 5 Avr - 16:47

Chicago, matinée, terrasse d'un café plutôt respectable, deux hommes attendent avec plus ou moins de patience qu'on vienne prendre leur commande. Dit comme ça, leur situation ressemblait à un vieux pitch de comédie romantique, le genre de celles qui sortaient sur les écrans pour les fêtes de Noël, ou qui égayaient les télévisions pendant l'après-midi. Pourtant, aussi étrange que cela pouvait paraître, elle demeurait aussi remarquable qu'inattendue aux yeux d'Emil, comme une sorte de bulle d'air déposée dans la mare de son quotidien sans vague. Une rencontre fortuite, deux routes qui se croisent, une invitation hasardeuse, un café, une route qui se continue côte à côte - qui savait où leurs pas les mèneraient après ça ? Peut-être pas plus loin que la terrasse de ce fameux café, peut-être un peu plus loin, Emil n'en avait pas la moindre idée mais, quelque part, cette incertitude l'incitait à profiter du moment présent, même s'il ne s'en doutait pas réellement. D'ordinaire, ses journées étaient bien moins surprenantes, à l'image d'une toile fade sur laquelle il essayerait d'ajouter un peu plus de couleur. Même si ses cours à l'université lui plaisaient bien plus que ses longs mois de droit, il était bien loin d'avoir la vie trépidante qu'il s'imaginait, à gambader d'expositions en expositions, toujours à l'affut de nouvelles sources de création. Non, à la place, il avait plutôt droit à de longs cours théoriques sur l'usage de telle ou telle couleur dans la peinture au fil des âges, l'évolution de la place de l'art dans la société, et les bienfaits de tel ou tel vernis sur les toiles de maître. Les journées réservées à la création avaient beau être une grande bouffée d'air frais pour lui, ses liens avec les autres étudiants n'étaient pas aussi parfaits qu'ils auraient pu l'être. Certes, il s'entendait plutôt bien avec la plupart d'entre eux, mais au fond, il doutait de pouvoir un jour faire appel à eux en cas de besoin. Après tout, il ne les connaissait que depuis quelques mois, et les artistes étaient loin d'être les plus aimables humains au monde, contrairement à ce que certaines personnes pouvaient penser. Un monde de requins, comme celui qu'il avait douloureusement quitté. Un monde de requins duquel il aimait pouvoir s'échapper, pour se laisser aller à des sessions de gribouillages soumises à bien moins de pression. Voilà ce qu'étaient ses flâneries, pour lui. Des heures qu'il se bloquait pour laisser son génie créatif s'échapper, ou en tout cas pour empêcher sa main de rouiller, et s'amuser à dessiner ce qu'il voulait. Dessiner un visage plutôt qu'un autre, préférer les silhouettes d'illustres inconnus plutôt qu'un modèle figé et emballé dans du papier cadeau. A l'image de la personnalité qu'il pensait avoir, ses croquis demeuraient bien plus honnêtes, bien plus vrais que de nombreux autres dessins qu'il avait pu faire sous la tutelle de certains professeurs. Une libre expression qui prenait la forme de quelques traits jetés sur du papier, des détails sublimés par une mine bien taillée, toute une existence projetée dans ces visages qui n'avaient la plupart du temps pas conscience de toute cette histoire. Il ne s'agissait de rien d'autre que quelques croquis. Des instants volés. Des pages gribouillées. Et d'une vie simple qu'Emil tentait d'améliorer par ce modeste passe-temps.

Ainsi, malgré les paroles du journaliste, il avait toujours un peu de mal à concevoir le fait d'être l'objet d'un tel intérêt, ne serait-ce qu'à petite échelle. Pour lui, dessiner ainsi était tout à fait "normal", comme il était normal pour les journalistes d'écrire, et pour les vieilles dames de nourrir les canards. Bien loin de posséder la vantardise de certains de ses camarades, il ne dessinait pas pour la postérité, ni même pour espérer frôler du doigt un quelconque succès. Au mieux, il ne faisait ça que pour se décharger de tout ce qu'il pouvait ressentir au quotidien, et tenir un crayon revêtissait des allures de libération plutôt que d'autre chose. Si on lui proposait un jour d'exposer ces portraits volés, il refuserait très certainement, tellement il ne parvenait pas à les voir autrement qu'un défouloir maîtrisé - la preuve, il avait instinctivement refermé son carnet lorsque Joshua était venu lui parler. Fronçant légèrement les sourcils en l'entendant lui répondre, il alla jusqu'à se demander s'il aurait du mieux formuler sa remarque, qui sonnait presque moqueuse maintenant qu'il se la remémorait. L'un dans l'autre, il n'avait plus d'autre choix que de faire avec, son Tardis étant garé un peu trop loin pour qu'il revienne en arrière. « C'est un journal d'information, pas très connu. Le Chicago Reader, il y a plusieurs rédactions et je me suis retrouvé dans un placard à balai à l'étage des exilés après avoir refusé d'interviewer une femme otage dont l'enfant avait faillit être tué. Génial hein ? J'ai pas réussi à sortir du placard depuis, et c'est assez long. » Un manque de chance, un mauvais coup du sort auquel Emil ne pouvait qu compatir, ayant parfaitement conscience de la douleur que pouvait engendrer le fait de se voir offrir des bâtons dans les roues de la sorte. Il grimaça quelque peu, sans pour autant couper la tirade du blond, visiblement bien parti pour occuper le silence, ce pourquoi l'étudiant ne pouvait pas le blâmer. Il avait beau le connaître depuis seulement quelques minutes, il s'intéressait pourtant à ce qu'il lui racontait, des banalités comme aux anecdotes un peu plus personnelles. Une forme de politesse à laquelle il avait toujours été habitué, probablement, ou simplement un intérêt modeste pour cet homme apparu subitement dans son quotidien. « Du coup je suis habitué aux articles sur la nouvelle gagnante du bingo au club des vieux de Chicago, des trucs de ce genre. Ce dont le journal se doit de parler mais dont personne n'en a rien à foutre. Mais je ne souhaite pas captiver la foule. Si le monde me lit tant mieux, je fais plus ça par passion qu'autre chose. J'aimerais écrire un article sur les générations oubliés de notre époque, sur tout ces jeunes qui vivent la, juste devant nous et que personne ne voit jamais. Comme vous. » Pour peu, il se sentait presque flatté d'être finalement le prétexte à un article visiblement bien plus profond et intéressant que ce qu'il s'était imaginé, comme en témoignaient ses mains, perdues quelque part sous la petite table qui trônait entre eux deux. « Ca a l'air plutôt intéressant comme article, dit comme ça... J'espère que vous trouverez de quoi l'écrire comme vous le souhaitez. » Un léger sourire pour répondre au sien, et la serveuse arrivé tout juste pour l'interrompre. Si Joshua commanda directement son café, Emil prit quelques secondes pour réfléchir, commandant finalement un latte macchiato au chocolat, bien moins viril, mais bien meilleur à ses yeux.

Suivant distraitement la serveuse des yeux, il tourna de nouveau la tête vers le journaliste en l'entendant reprendre la parole, posant ses mains sur la table pour s'empêcher de les triturer de nouveau. « J'aimerais écrire sur la créativité des nouvelles générations et leurs vies, ainsi que sur l'incompréhension qu'il y a entre les "jeunes" et les "vieux". Ce genre de questions ne vous dérangerait pas j'espère ? Sinon dites le, il n'y a pas de problème la dedans. Je peux vous demandez votre âge ? » Il fronça les sourcils, le fixant l'espace de quelques secondes tout en se demandant ce qui pouvait bien le gêner dans des questions pareilles. Certes, il ne se voyait pas réellement ami avec l'ancienne génération mais, pour autant, il ne s'estimait pas non comme étant leur adversaire, bien loin de là. Pourtant, sur le coup, il n'imaginait pas la situation vue de l'autre côté de la barrière, ni même les allusions que celle-ci pouvait avoir, ne serait-ce que d'un point de vue familial ou environnemental. Pour dire, il n'avait même plus en tête les nombreuses fois où la voisine du coin s'était enflammée contre son colocataire et lui, pour des raisons qui le dépassaient entièrement. Non, tout ce qu'il arrivait à voir, c'était cette futile question qui était apparu dans son esprit, ce petit mais pourquoi est-ce que ça me dérangerait ?. Croisant son regard, il se rendit compte qu'il n'avait même pas répondu et, se redressant subitement, il passa une main contre sa nuque, se maudissant presque aussitôt pour ce geste qu'il n'arrivait décidément pas à contrôler. « J'ai eu vingt-trois ans il y a quelques mois, et j'étudie depuis presque autant à la School Art Institute, en fait... » Tout en répondant, il revoyait presque le visage de sa soeur, lorsqu'il s'était décidé à partir. Son expression froide, si parfaitement maîtrisée, sa lassitude faussement feinte, et ses épaules fines qui s'étaient présentées à lui, alors qu'elle remontait les escaliers. Il était parti quelques semaines après son vingt-troisième anniversaire. Quelques semaines pendant lesquelles il avait hésité, eu du mal à finalement se décider à sauter le pas -même si, de pas, il avait plutôt l'impression d'avoir sauté une falaise en quittant le domaine familial. Famille... Famille à laquelle il avait lui aussi tourné le dos, en refermant la barrière derrière lui. Baissant les yeux, il tenta de mettre ses mots dans l'ordre avant de les relever vers Joshua, sourcils toujours froncés, mais plus de curiosité que d'incompréhension. « Est-ce qu'il y a des questions qui devraient me déranger ? Enfin vu la façon dont vous demandez ça, je... » Il marqua un bref arrêt, étouffant un rire bref alors que sa main retournait flirter dans sa nuque. « Désolé, j'ai pas vraiment l'habitude, j'ai aucune idée des questions que vous pouvez bien poser. » Un sourire, désolé, un regard qui croise le sien, tout autant et il se réajusta sur sa chaise alors que la serveuse revenait de nouveau avec leurs boissons. Une tasse, un grand verre, à défaut de jouer avec ses mains, il allait pouvoir maintenant les occuper avec quelque chose pour espérer se donner un peu plus de contenance. Attrapant son verre d'une main, il but une gorgée de son latte, observant brièvement son vis-à-vis par le biais de quelques regards lancés en sa direction. S'il avait eu le loisir de le dessiner à plusieurs reprises de loin, l'idée de pouvoir dessiner son portrait de plus près s'afficha malicieusement dans son esprit et, distraitement, il la garda de côté, se demandant naïvement s'il pouvait lui demander la permission plus tard. Après tout, l'entrevue loin d'être formelle venait de commencer, et il n'allait pas poser ses gros sabots d' "artiste" sur la table alors qu'ils venaient à peine de commencer à discuter. Ainsi, il reposa son verra avec quelques gorgées, ne pouvant s'empêcher de poser une nouvelle question, comme pour repousser inconsciemment le moment où lui-même devrait y répondre. « Vous n'avez jamais songé à changer d'employeur ? Vous avez l'air de vraiment aimer ce que vous faites, c'est dommage d'être contraint à couvrir des sujets qui ne vous correspondent pas forcément... » Sorti du contexte, c'était bien le genre de conseils dont il aurait eu besoin, quelques années auparavant, quand il ne s'imaginait pas vraiment vivre autrement que sous le joug de son père. Pourtant, ici, il n'était ni question de pouvoir paternel, ni même de sa noble personne et, seulement au moment de finir sa phrase, il se rendit compte de ce qu'il venait de dire, se redressant tout en secouant la tête pour s'excuser. « Jee... Désolé, j'imagine que vous avez déjà... enfin... pardon, ça ne me regarde pas. Et c'est à vous de poser les questions d'ailleurs. Voilà. Pardon. » Soupirant, il se laissa un peu tomber contre le dossier de sa chaise, tapotant nerveusement la table du bout des doigts. La discussion avait à peine commencé, oui, et il se demandait déjà où tout ça allait bien pouvoir les mener. A ses yeux, voir Joshua obtenir de quoi écrire un article convenable tiendrait du miracle, ou alors d'un génie rédactionnel. Parler de lui n'avait jamais été son fort, et pourtant il n'avait pu s'empêcher d'accepter. Sur un coup de tête. Une impulsion incontrôlée. Deux routes qui se croisent, deux destins qui se mêlent. Que fallait-il de plus pour mettre en route les rouages d'un futur indéterminé ?
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MessageSujet: Re: Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em EmptySam 6 Avr - 20:03

~ Don't wake me,
'cause I don't wanna leave
this dream
~


« Ça a l'air plutôt intéressant comme article, dit comme ça... J'espère que vous trouverez de quoi l'écrire comme vous le souhaitez. » Le garçon, gigotant, semblait nerveux. Mal à l'aise, réaction normal dans cette situation. Il ne savait pas ce qu'il lui avait prit et il n'arrivait même pas à le regretter. Le jeune homme semblait sympathique, il en avait en tout cas la tête. Une bouille de gamin et un grand sourire, il devait faire craquer les filles. Joshua eu un sourire en y pensant, se rappelant son époque du lycée, et de la fac par la suite. « Merci, je ne pense pas que ce sera compliqué si tout les gens sont aussi sympathiques que vous et se laissent interroger. » La commande partie rapidement. Josh avait de plus en plus envie de ce café. Le liquide suffirait à lui remettre les idées au clair. Expliquant son idée de base, il posa les coudes sur la table, se penchant sans même faire attention vers l'autre homme. Il était bien trop dans ses pensées pour se rendre contre de la soudaine proximité qui, de plus, ne le dérangeait pas. Il continua sa discussion, heureux d'avoir une réponse d'Emil même si celle-ci lui parut étrange. Rêvait-il ou le jeune garçon avait donné ces informations avec beaucoup de mélancolie ? Une sorte de tristesse cachée au fond de son bonnet certainement. Tristesse qu'il avait donc enfouit dans son sac pour ne plus la ressortir. Tristesse qui pourtant en cet instant transparaissait dans ses grands yeux d'enfants. D'un coté il faisait ses vingt-trois ans, de part sa jeunesse et son attitude posée. Mais cependant une certaine douceur et une âme d'enfant ne cessaient d’éveiller la curiosité du journaliste. Un petit garçon dans un corps de grand, pas très à l'aise et pas très assuré. Au fond, ce n'était pas Gallagher, le journaliste qui voulait savoir. C'était Josh, qui voulait comprendre l'artiste, qui voulait savoir pourquoi lui, et qui se sentait comme attiré, tel un aimant, par ce gosse qui n'avait pourtant rien fait pour. Comme si l'autre possédait un grand secret, le secret d'une vie encore inconnue. Il se sentait assez mal, la tête encombré par toute sortes de questions, toutes plus saugrenues les unes que les autres. À croire que la solitude lui pesait, voilà qu'ils allaient se chercher des amis dans les rues. Il ne choisissait pas n'importe qui qui plus est, mais des artistes bien plus jeunes et bien plus seuls que lui. Enfin c'est ainsi qu'il voyait l'autre homme. Un solitaire qui faisait son bous de chemin bien seul, ne se souciant pas d'où mènerait cette route qu'il suivait tel un apôtre. Oui, voilà ce que c'était. Une attirance céleste, comme un homme face à une église. Emil était une église, une cathédrale à la nef bouclée, à l’hôtel brun et aux yeux de vitraux. Une église de croyance, de découverte, de création et d'apaisement. Une église qui, il en était sur, attirerait de nombreux fidèles d'un simple regard. Tel Alexandre devant son Héphaestion, tel Achille aux yeux de Patrocle, tel un Grantaire suivant son Enjolras. Tel un septique devant le croyant, un songeur devant les songes. Comme la théorie du grand homme, de Thomas Carlyle, qui pensait que certains hommes étaient fait pour en attirer d'autre. Une idée stupide dans ce contexte, mais résumant pourtant bien les sentiments du blond. Ce fut simplement la seule réponse qu'il réussi à formuler à ses trop nombreuses questions. La curiosité c'était transformé en une douce admiration devant l'air calme du jeune homme, devant son talent et devant son sourire. Son sourire ?

Il chassa de suite la pensée et se concentra sur les mots d'Emil, bien moins déconcertant que ces propres pensées. « Est-ce qu'il y a des questions qui devraient me déranger ? Enfin vu la façon dont vous demandez ça, je... Désolé, j'ai pas vraiment l'habitude, j'ai aucune idée des questions que vous pouvez bien poser. » Josh le regarda sourire, il suivit le chemin de sa main sur sa nuque et resta là, comme hypnotisé. Sans même s'en rendre compte. Il lui fallut un moment pour redescendre sur terre, et il se dépêcha de répondre pour ne pas paraître trop louche, alors qu'un mal de crâne pointait le bous de son nez. « Non pas de panique. Je demande toujours au cas où. Si vous n'avez pas envie de répondre vous en avez le droit. Je ne sais pas non plus, je vous avouerais que j'y vais plus au feeling qu'autre chose, ce qui ne me ressemble pas à dire vrai. Mais il faut toujours suivre son instinct non ? » Il se laissa sourire au garçon un moment, puis se recula pour laisser la serveuse poser les boissons. Souriant, il attrapa son porte-feuille et paya rapidement les consommations, avant d'attraper son gobelet brûlant. Le café réussirait surement à retirer cet étrange sensation qui avait prit le journaliste depuis un moment maintenant. Sans plus de cérémonie il amena le gobelet à ses lèvres, humant l'odeur forte du liquide sombre. Avalant une grande gorgé brûlante, il sentit la chaleur descendre jusqu'au creux de son ventre. Le café était fort, de quoi le tenir éveiller toute la nuit. Il ne travaillait jamais mieux que sous caféine, à s'en perfuser h24. C'était sa drogue à lui, sa promesse d'un paradis fictif et sans part d'ombre, si ce n'est le trouble du liquide brun. Tout en buvant il remarqua le regard de l'autre sur lui, le faisait rougir très légèrement. Il n'était plus habitué à tant d'attention, et celle du garçon n'était pas véritablement conventionnelle. C'était une de ces attentions que les jeunes filles adorent, et que les garçons répugnent. Cependant il ne se trouva pas plus gêné que ça, il était simplement flatté. Il ne pu s'empêcher de sourire à cet instant, posant le gobelet chaud alors qu'Emil buvait lui aussi. Alors il était de ces personnes qui préféraient les cafés améliorés à base de sucreries ? Joshua n'avait jamais goûté ce genre de boissons, pensant que seuls les enfants en buvaient. Mais l'odeur de café et l'empressement du brun lui donna envie d'essayer. Il mit ça sur la liste de ces choses qu'il devait faire. Il réalisait souvent ce genre de voeux qu'il trouvait divertissant. Il attendit un peu, s’apprêtant à encore questionner le garçon, quand celui-ci reprit la parole. « Vous n'avez jamais songé à changer d'employeur ? Vous avez l'air de vraiment aimer ce que vous faites, c'est dommage d'être contraint à couvrir des sujets qui ne vous correspondent pas forcément... » Le silence ce fit alors que le blond tranquillité légèrement les sourcils, surprit par la question qu'il n'avait lui même jamais osé ce poser. après tout c'était vrai, son boulot ne lui correspondait pas. À trente ans il tournait en rond, et il avait fallut un garçon de sept ans de moins pour qu'il en prenne conscience. « Jee... Désolé, j'imagine que vous avez déjà... enfin... pardon, ça ne me regarde pas. Et c'est à vous de poser les questions d'ailleurs. Voilà. Pardon. » Et voilà qu'Emil baissait les yeux, comme un enfant fautif, alors que Joshua ne pouvait faire autrement que de sourire, à croire que cela devenait une terrible habitude auprès de l'étudiant. « Ne vous excusez pas ! Au contraire, vous avez complètement raison. Je ne me suis en faite jamais posé la question, étrange non ? Je crois bien que j'ai trop peur de ne rien trouver pour ne pas oser foutre un bon poing dans la figure de mon patron, et pourtant ce n'est pas l'envie qui me manque ! En tout cas je suis heureux de savoir que j'ai l'air impliqué. Je passe mon temps à bosser en faite, je ne pense qu'à ça, je ne prend pas le temps pour sortir. Un conseil, ne faites pas comme moi. Parce qu'à trente ans vous vous rendez compte que tout vos potes sont mariés, ont un boulot de rêve et sont bien heureux. Et vous vous retrouvez devant votre télé tout seul le samedi soir. » Un mince sourire se dessina sur son visage alors qu'il baissait la tête vers son gobelet. L'avouer haut et fort était plus douloureux qu'il ne l'aurait songé. Il était indéniablement seul, et il n'avait pas la moindre idée de pourquoi. Reprenant une gorgé de café il préféra penser à autre chose et commença son interview, plus tout à fait sur de ce qu'il devait dire. « Bon alors première question, qu'est ce qui vous a poussé à devenir artiste ? Et quel est votre motivation pour le dessin de rue ? Vous devez surement avoir des modèles bien plus interessant à l'école non ? »


crédit: woodspoon
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MessageSujet: Re: Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em EmptyDim 7 Avr - 16:33

Malgré tout ce qu'il pouvait en penser, malgré même le fait qu'il ne se sentait pas entièrement à l'aise dans cette situation qui le mettait face à un regard qu'il n'avait pas l'habitude d'affronter, Emil devait bien avouer une chose : en se levant ce matin, il n'avait pas imaginé une seule seconde qu'il se retrouverait assis sur cette terrasse, à siroter un café en compagnie d'un journaliste plus que charmant -sur un plan professionnel, évidemment. Il n'avait suffit de presque rien pour que sa journée prenne un chemin dont il n'avait même pas osé songer une seule seconde, qu'elle prenne un tournant décisif comparé à son quotidien bien trop routinier, ou en tout cas qu'elle commence à prendre son envol, bien loin des silhouettes fades et des visages tristes qui peuplaient généralement les rues de Chicago. Plutôt que de grimaces, il avait droit à des sourires, polis ou plus affirmés, mais qui pourtant ne tarissaient pas, comme si, quelque part, plus rien n'avait d'importance autour d'eux, et que cette table qu'ils partageaient était en peu de temps devenue l'image du monde, de leur monde, dont ils prenaient un peu plus possession à chaque seconde qui s'écoulaient. Ainsi, leur monde prenait maintenant la forme d'une table de bois, de deux boissons et de quelques questions, qui attendaient des réponses, pour mener à d'autres questions, un monde qui ne payait pas de mine aux yeux des autres habitués de la terrasse, mais qui semblait leur convenir, du moins pour le moment, et à des doses relatives. Si Joshua était parfaitement à l'aise dans cette situation et que son attitude ne laissait voir qu'une assurance gagnée grâce à ses années de métier, Emil était bien loin d'afficher pareille expression et, en fait, il semblait presque afficher tout le contraire, à quelques détails près. S'il n'en était pas au point de vouloir se cacher sous la table pour échapper à une attention pareille, ses gestes inconscients trahissaient son état quelque peu inconstant, et surtout la corde bancale sur laquelle il avait l'impression d'avancer. Ses mains jouaient avec ce verre qui comblait ce léger vide entre ses doigts, ses pieds étaient presque sur le point de taper doucement sur le sol et, surtout, son regard voguait à droite et à gauche sans vraiment trouver un endroit convenable où se poser. Un pot de fleurs colorées, le chapeau original d'une cliente assise à une autre table, les traits harmonieux qui lui faisaient face, il notait chacun des menus détails qu'il pouvait voir, changeant de lieu d'exploration dès que l'envie se faisait ressentir, à la manière d'un papillon voletant au gré du vent autant qu'au gré de ses envies. Trivialement, le problème, si problème il y avait, résidait dans le fait qu'aujourd'hui, à cet instant présent, c'était lui le centre d'attention, lui qui se faisait observer sous toutes les coutures et qui devait répondre aux questions, des évènements qu'il avait toujours préféré fuir lorsqu'il y avait été confrontés, et qui l'avaient sûrement conforté dans l'idée d'être de l'autre côté de la verrière, et d'observer plutôt que d'être observé. Après tout, en tenant son crayon, il devenait une une sorte d'appareil photo humain, une caméra vivante et silencieuse qui pouvait se permettre de capturer les clichés qui l'intéressaient, de poser son regard mutique sur le monde qui l'entourait, sans chercher à se faire voir ou se faire connaître, bien loin de là. Silencieux, immobile, il n'était plus qu'une statue de glaise assise sur un banc, une silhouette fragile et sans histoire, une personne sans passé qui ne faisait plus qu'une chose : dessiner le présent d'autres formes, retranscrire les portraits d'autres visages qu'il ne connaîtrait jamais. A l'image d'un Big Brother attentionné, il se nourrissait de ces autres histoires tout comme il s'en inventait parfois, au détour d'un coup de crayon ou de gomme. Poser sur papiers tous ces gens dont il s'imaginait la vie revenait en quelque sorte à leur offrir l'attention dont ils ne bénéficiaient parfois pas, à leur offrir cette visibilité qu'ils ne pouvaient réclamer, légitimer leur vie sans même qu'ils n'en aient conscience. A quoi bon les prévenir ? A quoi bon croiser leur regard et se vanter d'avoir pu capturer l'essence de leur humanité ? Il n'était pas un de ces artistes sans âme, un de ces voleurs de portraits qui ne dessinaient que pour ensuite réclamer un peu d'argent. Bien plus terre à terre, lui ne dessinait que parce qu'il en avait envie, finalement, et que cela lui permettait d'échapper un peu plus longtemps à des problèmes qu'il tentait toujours de repousser un peu plus loin.

Joshua avait peut-être raison de parler d'instinct, quelque part. N'était-ce pas ce qu'il avait fait après tout, lorsqu'il avait décidé de prendre les devants et de claquer la porte de sa maison derrière lui ? Fuguer à vingt-deux ans, l'image avait de quoi faire rire, il en avait conscience. Pourtant, même débarrassé de ce carcan familial, il ressentait toujours la menace de son père sur ses épaules, cette menace voilée qui l'atteignait encore par le biais de sa soeur, et de ses interminables appels qu'il s'amusait encore à rejeter, comme si elle allait être capable de deviner où il était s'il faisait l'erreur de décrocher et de lui parler. Fuir, courir loin se terrer comme une souris au fond de son trou, tant de réactions qui étaient devenues son log quotidien depuis quelques mois, autant d'habitudes à prendre, de rues à éviter, et de coup d'oeil à jeter derrière lui. Voilà ce qui était vil, avec le fait de suivre son instinct - on ignore dans quelle direction il nous mènera et, au moment de changer d'avis, il est généralement trop tard pour faire demi-tour. Il avait du attendre vingt-deux ans pour suivre son instinct, et tout ça pour quoi ? Pour pouvoir continuer à construire sa chimère faite de peinture et de crayons, vivre ce rêve éveillé qu'il ne voulait quitter pour rien au monde, quitte à abandonner toute idée de luxe et de confort. Il avait troqué sa grande maison pour un appartement miteux, les repas fastes contre des pâtes blanches, sa famille contre un colocataire collant - mais s'en plaignait-il ? Loin de là. Il pouvait à présent vivre sa vie, et qu'importe si d'autres le jugeaient, qu'importe si on le montrait du doigt ou si ça vie ne valait pas grand chose, car c'était à présent la sienne, et il pouvait la mener de la façon dont il l'entendait. Alors oui, suivre son instinct pouvait être une bonne façon de prendre des décisions, pour le meilleur ou pour le pire et, plutôt que de penser à tous ces souvenirs qui pourraient ressurgir faute de questions malvenues, il préférait se dire que cette rencontre inattendue pouvait être positive, ne serait-ce qu'un peu, même si dans l'immédiat, il commençait à légèrement en douter. Attaquer de but en blanc en demandant naïvement pourquoi le journaliste préférait s'embourber dans un emploi qui n'était pas fait pour lui n'avait pas été la meilleure des tactiques et, assis au fond de sa chaise, Emil n'osait plus bouger, guettant discrètement la réaction du blond, qui ne se fit pas attendre. Des sourcils haussés, un silence tombé subitement comme un soufflé raté, une surprise qui, en un tour de main, s'était échouée sur son visage aux traits toujours harmonieux. Est-ce qu'il avait poussé le bouchon un peu trop loin ? Probablement oui, en tout cas l'affirmative ne l'étonnerait pas. De quel droit se permettait-il de formuler des choses pareilles, alors qu'il ne connaissait rien de sa vie, ni même de sa personne ? Malpoli, voilà ce qu'il était. Le genre de lourdeau qui mettait toujours un pied de travers sans le faire exprès. Il mériterait sûrement les paroles froides qui sortiraient de la voix du journaliste et si l'interview prenait aussi vite fin, ce serait bien fait pour lui. Pourtant, en relevant les yeux après quelques secondes, ce ne fut pas de la colère qu'il aperçut sur le visage du journaliste, mais un sourire, qui se voulait tout à coup bien triste. C'est peut-être à ce moment-là que la vérité lui sauta au visage, ou qu'il prit conscience de quelque chose qu'il avait pensé sans le formuler clairement dans son esprit, mais qui était pourtant vrai : Joshua était beau. Ce n'était pas le genre de beauté artificielle créée force d'actes chirurgicaux et de retouches photoshop, ni même celle que l'on tentait de fabriquer grâce à des montagnes de maquillages, bien au contraire. Il possédait plutôt cette beauté naturelle, cette aura simple et pourtant cruellement sincère que bien d'autres personnes cherchait à obtenir par tous les moyens,s ans y parvenir vraiment. Peut-être qu'aux yeux d'autres personnes, il était simplement ordinaire, peut-être qu'il entrait tout juste dans la normale -mais qu'est-ce que la norme, après tout ?- mais aux yeux de l'artiste, il dégageait ce mélange de spontanéité et de simplicité qui le rendait certainement plus pur que bien d'autres hommes. Naturel, voilà ce qu'il était. Naturel, et foncièrement vrai. Et la douce tristesse qui se peignait sur ses lèvres ne faisaient que lui conférer plus d'attrait qu'il n'en avait déjà.

« Ne vous excusez pas ! Au contraire, vous avez complètement raison. Je ne me suis en faite jamais posé la question, étrange non ? Je crois bien que j'ai trop peur de ne rien trouver pour ne pas oser foutre un bon poing dans la figure de mon patron, et pourtant ce n'est pas l'envie qui me manque ! En tout cas je suis heureux de savoir que j'ai l'air impliqué. Je passe mon temps à bosser en fait, je ne pense qu'à ça, je ne prends pas le temps pour sortir. Un conseil, ne faites pas comme moi. Parce qu'à trente ans vous vous rendez compte que tout vos potes sont mariés, ont un boulot de rêve et sont bien heureux. Et vous vous retrouvez devant votre télé tout seul le samedi soir. » Sans qu'il n'ait eu besoin de le demander, il se retrouvait avec bien plus d'informations qu'il n'en avait besoin, même si cela ne le dérangeait pas réellement. Une légère pointe de mélancolie perçait dans ses paroles, qui en devenaient encore plus criantes de vérité. Emil ne put s'empêcher de sentir son coeur louper un battement et, silencieusement, il déglutit, tentant de fixer dans sa mémoire cette expression vraie qu'il n'avait vue que sur trop peu de visage. S'il avait parfois pu divaguer en dessinant ses traits, comme il le faisait avec bien d'autres modèles de rue, il ne s'était pourtant jamais imaginé une vie aussi solitaire, derrière cette silhouette perdue au milieu de Chicago. Pour lui, le grand blond devait certainement avoir une fiancée qui l'attendait, quelque part à l'autre bout de la ville, vêtements hors de prix et sacs de shoppings dans les mains, ou dans une école primaire, à s'occuper de petites têtes malicieuses, avec une robe à pois et des cheveux sombres. Voilà, une institutrice, il n'aurait su le dire pour quoi mais dans son esprit, sa silhouette qui ne possédait alors pas de nom fréquentait une jeune institutrice remarquablement aimable. Alors en une matinée, mettre un nom sur un visage et apprendre que la réalité n'avait rien d'enviable à ses fictions était une vérité qui détruisait pas mal de ses chimères. Il se sentait triste pour lui, et coupable quelque part, même s'il n'y pouvait concrètement rien -le brun était loin d'être responsable de tout le bonheur du monde. L'instant indélicat prit cependant bien vite fin, et une gorgée de café noyée cette tristesse sous son amertume, la glissant sous des questions aui auraient du être posées bien plus tôt. « Bon alors première question, qu'est ce qui vous a poussé à devenir artiste ? Et quel est votre motivation pour le dessin de rue ? Vous devez surement avoir des modèles bien plus intéressant à l'école non ? » Clignant des paupières, il mit quelques brèves secondes avant de répondre, quittant Joshua des yeux pour tenter de mettre en forme les semblants de réponse qui se battaient dans son esprit. La table s'étala sous ses yeux et, silencieux, il remonta le fil de son passé, pas assez loin, puis un peu trop loin peut-être. Sourcils froncés, il releva la tête vers le ciel, puis vers Joshua, réfléchissant à ce qu'il disait tout en parlant, probablement la pire des façons possible de répondre. « Je crois que... je crois que j'ai toujours eu besoin de dessiner en fait. Vous savez, un peu comme les enfants qui ont besoin d'écouter des histoires le soir, et de s'imaginer combattre des dragons ou vivre des aventures totalement folles, je pense que j'n'ai pas voulu abandonner ça, que j'ai besoin d'un crayon pour m'évader de temps en temps, et de penser à autre chose qu'à un quotidien pas forcément incroyable. » Sourire en coin, il se gratta la joue d'une main, glissant un regard vers son latte avant de relever les yeux vers Joshua. « Après, pour être honnêtes, les modèles qu'on peut avoir à l'école sont loin d'être aussi... "vrais" que ceux qu'on peut trouver dans la rue. Enfin... ça ne m'intéresse pas vraiment de dessiner des gens aux poses et aux visages figés, je préfère de loin m'aventurer dehors et capturer le sourire simple d'une vieille dame nourrissant des canards, ou la joie d'une enfant attrapant son chat, l'embarras d'un homme qui hésite à aborder la fille assis à côté de lui sur un banc, ce genre de choses... C'est une façon bien plus honnête de retranscrire les émotions humaines, vous ne pensez pas ? » Il ne cherchait même pas à défendre son travail, mais simplement à expliquer sa façon de voir les choses à cet homme sûrement aussi curieux que lui. Souriant de plus belle, il était juste heureux de pouvoir partager ces quelques minutes de simplicité, loin du regard critique de ses professeurs et de ses camarades. Attrapant son verre, il en but une petite gorgée, avant de reprendre la parole une dernière fois. « Au fond, c'est un peu comme ce que vous avez dit... Vous écrivez plus par passion qu'autre chose, je dessine des inconnus plus par envie et par besoin que pour la postérité. Je ne cherche pas à dessiner les mêmes choses de la même façon que trente autres élèves à côté de moi, juste à me faire plaisir avant tout... Si vous pouviez écrire sur le sujet qui vous tient le plus à coeur sans vous soucier de l'avis d'un quelconque patron au dessus de votre tête, vous feriez quoi ? »
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MessageSujet: Re: Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em EmptyJeu 18 Avr - 20:02

~ Don't wake me,
'cause I don't wanna leave
this dream
~


« Je crois que... je crois que j'ai toujours eu besoin de dessiner en fait. Vous savez, un peu comme les enfants qui ont besoin d'écouter des histoires le soir, et de s'imaginer combattre des dragons ou vivre des aventures totalement folles, je pense que j'n'ai pas voulu abandonner ça, que j'ai besoin d'un crayon pour m'évader de temps en temps, et de penser à autre chose qu'à un quotidien pas forcément incroyable. » Sincérité. Poésie. Rêverie. Sourire adorable. Joshua ne savait plus vraiment ce qu'il écoutait. Si il écoutait. Il regardait le garçon parler avec l'âme d'un sage et le visage d'un enfant. Un savant mélange de savoir et d'ignorance, de froideur et de tendresse. Un savant mélange de mots étudiés, recherchés, et de sentiments purs et réels. Tout ce qui fascinait le journaliste. Le garçon semblait en tout point être un garçon intelligent, un garçon qui réussirait quoi qu'il en coûtait. Il ne savait même pas pourquoi il pensait se genre de chose, il ne savait de toute façon même plus si il pensait. Il écoutait, il écoutait le flot de paroles, la mélodie, et l'air autour d'eux. Désireux d'en savoir plus toujours plus, il resta silencieux. Il attendait la suite qui vint rapidement. Parce qu'il ne pouvait tout simplement couper l'artiste en pleine création de mots et de rêves. Un passionné comme lui l'avait été, le genre de garçon en lesquels il avait une foi infini mais qui se faisaient de plus en plus rare au fil du temps. Les gosses de maintenant voulaient l'argent, la reconnaissance et le succès social. Des idées préconçus par des vieillards qui ne voulaient voir ni l'anarchie ni la remise en question de leurs exemples. Et quoi de mieux qu'un rêveur aux crayons taillés pour remettre tout en cause ? L'apparence devient une arme dès lors que l'on dessine la vérité vrai, la vérité pure et blessante tel qu'on la voit. Après tout, un artiste n'est jamais objectif. « Après, pour être honnêtes, les modèles qu'on peut avoir à l'école sont loin d'être aussi... "vrais" que ceux qu'on peut trouver dans la rue. Enfin... ça ne m'intéresse pas vraiment de dessiner des gens aux poses et aux visages figés, je préfère de loin m'aventurer dehors et capturer le sourire simple d'une vieille dame nourrissant des canards, ou la joie d'une enfant attrapant son chat, l'embarras d'un homme qui hésite à aborder la fille assis à côté de lui sur un banc, ce genre de choses... C'est une façon bien plus honnête de retranscrire les émotions humaines, vous ne pensez pas ? » Le blond sembla se réveiller soudain d'une sorte de transe. Avalant un peu de son café comme si de rien n'était, il hocha la tête et répondit sans véritablement hausser la voix, en pleine réflexion sur les paroles d'Emil. « Si si, vous avez raison je suppose. Je ne suis pas très doué en matière d'art, mais je sais une chose. Rien n'est plus beau que la vérité pure. » Un sourire osa même se poser sur ses lèvres alors qu'il continuait à écouter l'autre homme, comme fasciné par cette réflexion, cette personnalité que possédait Emil. Vouloir croquer la vie à pleine dent, lutter pour celle-ci et n'aimer que le brut des choses. La vie, en faite. Enfin, une vérité frappa Joshua. Emil n'était pas comme les autres. Pas comme les étudiants idiots qui étaient capitaines de l'équipe de foot, pas comme ces popstars qui ne savaient pas où se situe les pays d'Europe, pas comme ces jeunes déprimés qui remplissaient leurs blogs d'insultes et de menaces. Il semblait plus mature, plus ouvert. Dans un sens il rejoignait ses convictions. Il était la vérité brut, ça et rien d'autre. Et ce qui fit presque peur au journaliste un court moment. Parce qu'il avait du mal à ne pas regarder le jeune homme boire, parce qu'il ne pouvait pas ne pas écouter ses paroles et parce qu'il le trouvait charmant. Pensé bizarre qui disparu quand Josh se figura que c'était son ancien instinct de journaliste qui revenait au galop le faisant se fasciner de tout. « Au fond, c'est un peu comme ce que vous avez dit... Vous écrivez plus par passion qu'autre chose, je dessine des inconnus plus par envie et par besoin que pour la postérité. Je ne cherche pas à dessiner les mêmes choses de la même façon que trente autres élèves à côté de moi, juste à me faire plaisir avant tout... Si vous pouviez écrire sur le sujet qui vous tient le plus à coeur sans vous soucier de l'avis d'un quelconque patron au dessus de votre tête, vous feriez quoi ? » Bonne question. Excellente question. Joshua réfléchit un instant, laissant son regard glisser sur la table, se rendant d'ailleurs compte que celui-ci n'avait que trop rarement quitté l'étudiant. « Je... Je me laisserais aller, et je me donnerais à fond dans ce que je fais, parce que c'est ce que j'aime. » Et relevant les yeux, il eu un mince sourire, un sourire figure d'espoir et de tristesse. Emil le faisait se remettre en question, une grande première avec un inconnu, et Josh se sentait presque gêné que celui-ci aie une telle influence sur ses sentiments à cet instant. Il suffisait d'un mot du garçon pour qu'il remette en doute 4 ans de sa vie et plus encore, son futur. Un futur qui n’existait plus véritablement désormais. Futur balayé par quelques mots, un café et de grands yeux bleus. Et d'un coup il se sentit emporté par tant de questions, tant de petites curiosités et tant d'envies qu'il ne sut par où commencer. Si il s'écoutait, l'entretien durerait des heures, voir des mois. Si il se laissait aller à écouter, il durerait une vie. Seulement le destin sembla en vouloir autrement et alors qu'il ouvrait la bouche il entendit la sonnerie de son téléphone. S'excusant auprès de son invité, il décrocha, se détournant légèrement comme pour se couper de l'entretien. À l'autre bous, son rédacteur en chef, apparemment hors de lui. Il tenta de le calmer, écoutant sans véritablement écouter les insultes et les menaces. Du travail en plus, une grosse histoire et pas de temps à perdre. Il raccrocha et se leva d'un bon, soudainement assez agité et préoccupé. Enfilant sa sacoche sur l'épaule il attrapa son gobelet presque vide, et posa les yeux vers son vis à vis. « Ecoutez je suis vraiment, vraiment désolé. Mon boss vient de m'appeler, il veut de moi sur une affaire importante. Si je n'y vais pas rapidement vous retrouverez pas tête sur un des piquets de la grille du parc, et je ne suis même pas sur que ce soit une plaisanterie. J'aurais aimé... » S'arrêtant dans sa soudaine panique, il regarda Emil, presque triste. Qu'aurait-il aimé ? Tant de chose, et rien pourtant ne sorti d'entre ses lèvres. La situation était étrange, voilà tout. Il aurait aimé rester, en savoir plus sur l'autre homme, rire avec lui et parler, parler jusqu'à plus soif, jusqu'à en devenir muet. Mais son devoir l'appelait. « J'ai été ravi de faire votre connaissance Emil. J'espère vous revoir dans le coin, en espérant que je ne vous stopperais pas en plein dessin cette fois. » Il hésita à serrer de nouveau la main au garçon, et trouva le geste trop formel. Quelque chose d'inédit était arrivé, et une poignet de main austère briserait tout. Alors il fit un signe de la main et fila, le sourire au lèvre sans même savoir pourquoi. Il ne parlait pas aux inconnus, il ne s’intéressait pas à l'art, il se croyait invisible aux autres. Il ne se laissait pas retourner le cerveau par des personnes qu'il ne rêverait surement jamais. Après tout, la ville était si grande, jamais ils ne se recroiseraient. C'était une de ces rencontres qui arrivent par hasard et qui restent dans les mémoires longtemps, sans vraiment de raison. Et pourtant, l'autre homme lui avait rendu sa journée un peu meilleur.


crédit: woodspoon
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MessageSujet: Re: Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em Don't wake me, 'cause I don't wanna leave this dream + em EmptyLun 29 Avr - 12:26

Les minutes s'écoulaient, indiciblement, silencieusement, indéfiniment, même si, honnêtement, Emil était à des lieux de s'en soucier, à cet instant présent. Posé, quelque peu stressé, mais quelque part en confiance, il tentait d'apprécier ce moment pour ce qu'il était, à savoir une bulle d'air inattendue dans cet immense océan de buildings et de bâtiments gris auxquels il tentait de redonner un peu de couleur, n'était-ce qu'en leur offrant un regard neuf, celui qu'on appelait trivialement "le regard d'artiste". Trop rêveur pour son bien, il lui arrivait régulièrement de se perdre dans des rues qu'il connaissait d'ordinaire, uniquement parce qu'il avait passé quelques minutes à observer la forme des fenêtres et des toitures, et qu'il n'avait pas réellement regardé où il allait. Pour lui, se perdre représentait plutôt un mal pour un bien car, bien loin d'emprunter des raccourcis et de vivre dans l'ère du "toujours plus" comme bon nombre de ses camarades ou connaissances, il préférait de loin vivre de découvertes infortunes qui n'en étaient que doublement intéressantes, puisqu'il ne savait jamais à quoi s'attendre. Parfois, il croisait la forme intéressante d'un buisson ou la robe originale d'un chat errant, il observait l'expression sincère et soulagée d'une mère accueillant des enfants qu'elle n'avait pas vus depuis des jours - et parfois, il ne voyait rien, mais n'en ressortait pas bredouille pour autant. Si Chicago était toujours une prison, pour d'autres citoyens tout comme pour lui, il tentait néanmoins de l'agrémenter toujours un peu plus, à sa façon, de transformer son sol trop terne en un terrain de jeu que lui seul était capable de voir. La ville devenait ainsi sa cour de récréation, son carnet de croquis ses règles de jeu, et les habitants autant d'acteurs qui n'avaient pas conscience du rôle qu'ils jouaient, sans le savoir. L'observation était la pièce maîtresse de son jeu préféré et, au roi du silence, il demeurait le gagnant invétéré. Vivre dans le visage d'autres personnes, se projeter dans des feuilles loin d'être chaudes et sensibles, quel mal pouvait-il bien y voir, au final ? Il ne dérangeait personne, lorsqu'il dessinait et, au contraire, tendait à s'effacer encore plus qu'il ne le faisait habituellement. Camouflage des temps modernes, bien plus facile à porter qu'une combinaison kaki, son bonnet d'artiste lui offrait le confort d'une existence oisive, qu'il appréciait plus que permis, et dont il se nourrissait jours après jour. Une chimère faite de dessins et de formes esquissées au crayon de bois, un rêve éveillé fait de visages et de sourires dont il n'était que témoin -d'ordinaire, oui, mais pas aujourd'hui.

Les règles du jeu avaient changé, la situation s'était renversé et, de spectateur passif, Emil était rapidement devenu l'un des acteurs principaux de la pièce, voir même le plus important, un fait devenu réalité qui le mettait toujours quelque peu mal-à-l'aise. Parler de lui ressemblait plus à un calvaire qu'à une bonne opportunité même si, dans chacun des mots qu'il pesait soigneusement, il tentait de transmettre au journaliste toute la passion qui pouvait l'habiter. Dessiner était plus que sa vie, s'il prenait la peine d'y réfléchir. Jamais il n'avait pu se résoudre à faire autre chose, et pour rien au monde il ne souhaiter changer de voie, poursuivre un autre chemin. Il construisait son rêve chaque jour, s'approchait un peu plus d'un but qu'il ne s'était pas encore fixé. Pourquoi s'évertuer à courir après des rêves inatteignables alors que l'on pouvait profiter pleinement d'une existence qui nous tendait les bras ? Épicure n'aurait pas fait mieux et, loin d'être le digne représentant d'une génération qui courait après le temps, lui était plutôt le fils indigne qui faisait courir le temps derrière lui. Qu'importait le succès, qu'importait même que Joshua se souvienne de son nom, lorsqu'il écrirait son article -s'il l'écrivait un jour-, tout ce qu'Emil voulait laisser, c'était une trace de sa passion, une image de ce qu'il aimait, un aperçu de cet art qui faisait battre son coeur, et qui lui permettait de marcher jour après jour. Jouer des mots n'était pas réellement chose aisée, pour lui qui préférait jongler avec ses crayons mais, à en juger par l'expression du journaliste, il se dit distraitement qu'il ne devait pas s'en sortir trop mal. Pourtant, il ne pouvait s'empêcher de toujours renvoyer la parole à Joshua, dans ses regards comme dans ses paroles, à le faire participer à cette discussion pour en effacer le côté interview qui l'ennuyait tant - une question, un léger sourire, et la voix du journaliste, hésitante face à ses propos presque trop enthousiastes. « Je... Je me laisserais aller, et je me donnerais à fond dans ce que je fais, parce que c'est ce que j'aime. » Etirant un peu plus le fin sourire qui éclairait déjà ses lèvres, Emil ne pouvait s'empêcher de fixer le visage du journaliste, sans même prendre gare au temps trop important qu'il mettait à détailler et presque admirer chacun de ses traits. Sa tristesse semblait se peindre sur sa peau, l'agrémentant de reflets d'amertume et de chagrin, comme si, en l'espace de quelques mots, l'étudiant avait été capable de gratter sous la croute, de fendiller cette carapace pour apercevoir la véritable essence de cet homme, que lui-même avait visiblement tendance à oublier, ou à mettre de côté, par la force des choses. Légèrement, l'interview glissait sur un autre terrain, vers un autre registre, amenant avec elle une profondeur à laquelle aucun des deux hommes n'avait véritablement songé, et Emil ne pouvait que s'en sentir légèrement moins mal à l'aise. Ainsi, ils se trouvaient tous deux sur un pied d'égalité. Il ni avait finalement ni interrogateur, ni interrogé, et chacune des deux partie se renvoyait une balle faite de questions et de réponses, occupant toujours un peu plus un silence qui n'avait plus d'importance tant il était oublié. Et, comme dans chaque rêve agréable, la réalité reprit violemment le pas sur la fiction, et le monde s'écroula autour d'eux, pour ne laisser que les éclats du songe éveillé d'une nuit de printemps.

La sonnerie avait retenti bruyamment, sortant l'étudiant de sa torpeur et, haussant les sourcils, il acquiesça légèrement la tête en direction du journaliste, attrapant son latte d'une main tout en se d"tournant légèrement, lui conférant le peu d'intimité dont il était capable. Sirotant distraitement son café froid, il se força à détourner le regard, focalisant plutôt son attention sur les voitures qui roulaient de l'autre côté de la rue. Carrosserie grise, rouge, bleue, grise, elles défilaient plus ou moins vite et, finalement, il fit presque abstraction de la voix de Joshua et en oublia presque la couleur de ses yeux, d'où moins s'en persuadait-il. Un raclement de chaise le ramena de nouveau à la réalité et, tournant la tête vers le journaliste, il suivit sa silhouette se lever subitement, trop vite rejointe par une sacoche et une expression pressée. Gobelet à la main, droit comme un I, tout indiquait que la rencontre se terminait aussi vite qu'elle avait commencé et que rien ne pourrait arranger ce fait - une impression qui fut bien vite confirmée, lorsque le journaliste reprit la parole. « Ecoutez je suis vraiment, vraiment désolé. Mon boss vient de m'appeler, il veut de moi sur une affaire importante. Si je n'y vais pas rapidement vous retrouverez pas tête sur un des piquets de la grille du parc, et je ne suis même pas sur que ce soit une plaisanterie. J'aurais aimé... » Pendu à ses lèvres, Emil n'avait pas bougé d'un pouce, préférant attendre la suite plutôt que de le couper dans sa réflexion, ou de lui assurer qu'il n'avait pas à s'excuser. Même s'il n'en disait rien, lui-même aurait voulu bien des choses - que leur entretien se poursuive, ne serait-ce que pour quelques minutes, qu'il prenne le temps d'échanger leur opinions sur l'art, l'écriture, sur la ville, qu'il puisse dessiner un de ses portraits également -, mais aucun de ses mots ou de ses pensées n'était assez ordonné pour être formulé, pour un bien ou pour un mal. « J'ai été ravi de faire votre connaissance Emil. J'espère vous revoir dans le coin, en espérant que je ne vous stopperais pas en plein dessin cette fois. » A nouveau ce sourire et, plutôt qu'une énième poignée de main bien trop formelle, Emil fut plutôt ravi et soulagé d'avoir droit à un signe de main, comme en témoignait le fin sourire qui s'allongea tristement sur ses lèvres. « Ne vous en faites pas pour ça, ce n'était pas un mal. Le plaisir était partagé, bon courage pour votre article, et pour cette nouvelle affaire. » Enième sourire côté tête brune, un peu moins désolé certainement, quoiqu'un peu déçu et, sans rien trouver de plus à dire, il se contenta de suivre des yeux la silhouette du journaliste s'éloigner à grands pas. Dans sa main, son gobelet n'avait pas bougé et ce ne fut qu'en l'approchant de son visage qu'il s'aperçut qu'il le tenait toujours. Se laissant glisser un peu contre le dossier de sa chaise, il en but quelques gorgées, sans réellement savoir que penser de cet entretien. Du bon, du mauvais, de la nouveauté, une chaleur réconfortante - ses impressions se mélangeaient, pour ne former qu'un amalgame indicible et loin d'être facile à démêler. Même s'il en avait pensé l'inverse au début de leur rencontre, il aurait pu passer des heures à continuer à parler avec le journaliste et, avec le silence qui l'entourait à présent, il avait l'impression de n'avoir passé que trop peu de temps en sa compagnie. Les yeux dans le vague, il ne prêtait attention ni aux regards curieux que lui jetaient deux autres étudiantes assises non loin de lui, ni à son téléphone qui vibrait dans sa sacoche, ni même à son coeur qui tapaient sourdement au fond de sa poitrine. Le temps s'étirait paresseusement, les nuages couraient lentement dans le ciel, et les crayons étaient faits pour noyer le papier sous leurs mines de charbons. Aussi, sans un mot, sans un bruit, sans un regard vers l'extérieur, Emil sortit son carnet et quelques crayons, posant quelques traits sur un nouvelle feuille pour former les bases de ce visage qui venait de s'effacer de son champ de vision - et sa journée reprit son cours habituel, conservant tout de même la saveur sucrée de cette rencontre aussi inattendue qu'appréciée.

Sujet terminé ◮
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