Les héritages c'est comme les chromosomes, ça se choisit pas.
On ne vit qu'une fois, n'est-ce pas ? Cette vérité m'a frappé de pleins fouet quand mon frère est mort sous mes yeux du haut de mes seize ans. Putain que la vie est courte me suis-je dis. Tu peux crever en un instant, tout d'un coup sans que tu ne puisses y faire quelque chose. Ma façon de vivre, et ma façon de penser changèrent alors radicalement ...Retournons quelques années en arrière, dans une petite ville américaine nommée Salt Lake City. Née d'une liaison qui ne dura même pas un an, mon géniteur sans nom laissa derrière lui une jeune junkie et deux gosses. Autant dire que dès la naissance je n'avais pas les bagages nécessaires pour avoir une vie "stable". Bref. Même sans père, Sean et moi avions réussie à survivre malgré la loque sur le canapé qui nous servait de mère. Effectivement l'alcool et la drogue se disputaient rageusement dans l'esprit de ma mère, ainsi pour ne pas fâcher les deux, elle les prenait sans favoritisme. A l'époque j'étais une gentille petite fille, écoutant mon aîné sans discuter qui faisait tout pour aider ma mère à stopper cette dépendance destructrice. Et évidemment c'était peine perdue. C'était un cercle vicieux. Je l'avais compris en atteignant l'âge de raison. Mais mon frère ne l'entendait pas de cette oreille, et il essaya de sortir ma mère de ce merdier jusqu'à ce qu'elle fasse une overdose. Moi qui ne pouvais pas faire grand-chose, je regardais cette femme pathétique qui pleurait en nous rabâchant la même chose «
Je vais arrêter, c'est promis. Je vais le faire pour vous mes petits anges. » En enterrant cette bonne à rien j'en fus soulagé, au moins mon frère et moi pouvions enfin nous occuper de nous. Oui, Sean avait tout abandonné pour elle. Étude, petite amie, rêve ... Il avait sacrifié sa vie pour le bien de la famille. Famille qui n'était qu'illusion au passage. Désireux qu'il ne m'arrive pas la même chose, il avait fait en sorte que j'ai un bel avenir. Effectivement s'il y avait bien une chose que je maîtrisais à la perfection, c'était les maths. Les calculs les plus complexes étaient à mes yeux très faciles, c'était une sorte de don comme disait mon frère.
Le temps passa peu à peu, mon frère avait obtenu un boulot de barman. Il ne gagnait pas une fortune, mais son salaire suffisait in extremis à subvenir à nos besoins à tous les deux. Il avait mit un point d'honneur à ce que j'aille à la fac, c'était la seule chose qu'il m'avait demandé. Alors, l'écoutant comme toujours sans rechigner malgré le fait que je n'aimais guère les études, j'oubliais l'idée d'arrêter le lycée. Malgré tout, j'obtins un job à mi-temps pour au moins aider financièrement et histoire aussi de faire des économies pour la fac. Entre le lycée et le boulot, nos vies étaient des plus normales qui soient, et pourtant lors d'une nuit tout bascula d'un seul coup ... En train de dormir tranquillement dans mon lit, il était environ trois heures du matin quand mon potable sonna ...
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ui est le con qui m'appelle à une heure pareille ?!-
Désolé frangine ! Mais... J'ai un peu trop bu ce soir après le boulot, viens me chercher s'teuplait ... J'suis encore au taf ...-
Tu m'emmerdes ! J'arrive.Ce fût notre dernière discussion ... M'habillant rapidement, et prenant la voiture je pris route pour le "Paradize" lieu de travail de mon frère. Arrivé au feu rouge juste en face du bar, j'attendais patiemment qu'il devienne vert. Et c'est là que j'aperçus mon frère titubant en marchant. Il m'avait aperçu, alors voulant traverser la route pour me rejoindre ... Il n'arriva jamais à moi, se faisant violemment faucher par une voiture qui fonçait à toute allure. Je n'eus le temps de dire quoi que ce soit tellement ce fût rapide. Moi le voyant me faire signe, moi le regardant marcher vers moi, la voiture, le "boum" puis ... Plus rien. Sortant mécaniquement de la voiture, mes jambes bougèrent toutes seules vers ce tas sombre qui n'était autre que Sean. Faisant abstraction des gens qui appelait des ambulances, je me laissais tomber sur mes genoux voyant cette mare de sang sur le sol. Sean était mort. Les larmes ne coulaient pas, mais une douleur insoutenable naissait dans ma poitrine. A l'hôpital, ils n'avaient rien pu faire, il était mort sur le coup. J'avais refusé à la morgue de revoir ce bout de viande froid qui fût mon frère. Faisant en sorte que les funérailles soient rapides en l'incinérant. Ayant alors pris conscience que je ne le reverrai jamais, juste après l'enterrement je bus encore et encore jusqu'à en vomir mes tripes.
Quels sentiments naquirent en vivant cette vie pourrie ? De l'amertume c'est tout. Je me demandais toujours pourquoi j'avais une vie aussi merdique alors que j'en voyais pleins d'autres se pavaner avec un grand sourire en ayant le porte-feuille bien garnit. Être tout bonnement heureux quoi. «
Joy tu peux crever dans la minute qui suit ... » voilà ce que je me répétais sans cesse, il fallait vivre à pleine bouffée, profiter et n'avoir aucun regret. Effacer cette épave qui me servait de mère de ma tête, et ne plus penser à ce qui me faisait mal : Sean. Me forgeant alors une solide carapace, la gentille petite fille laissa la place à la rebelle fêtarde. Ce que je n'envisageais pas, c'était q'un jour je rencontre mon fameux paternel, le sale type qui avait laisser deux gosses avec une toxicomane sous prétexte que nous étions des "bâtards". Se présentant face à moi avec quelques avocats au restaurant où je travaillais, il ne prit pas quatre chemins pour me dire ce qu'il avait à dire :
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Je vais faire court. Je n'ai pas de fils, et ton frère est mort. J'aimerais que tu viennes avec moi à Chicago, pour devenir une fille de bonne famille, et épouser ton cousin.-
Rien que ça ? Tu as fais comme si je n'existais pas pendant des années, et tout d'un coup t'as besoin de moi et je vais ramper ? Et puis pour tes histoires de fille de bonne famille, tu repasseras monsieur le Parrain.-
Il semble que c'est dans le gêne, tu es passée dans la case prison toi aussi ...Alors il savait ... Comment je pouvais résister à l'homme qui était en face de moi alors que des rumeurs courrait sur lui comme quoi il était un gros poisson d'un syndicat ? La mafia si vous préférez. De plus, il connaissait mon passé, ce passé que je voulais tant oublier. Acceptant alors de venir avec lui, je finis par vivre à Chicago.