PRÉNOM OU PSEUDO ◮ Irlande
ÂGE ◮ 22 ans
SEXE ◮ féminin
Où AS-TU DÉCOUVERT LE FORUM ? ◮ Pub RPG
QU'EN PENSES-TU ? ◮ magnifique!
FRÉQUENCE DE CONNECTIONS ◮ 7/7.
MOT DE LA FIN ◮ félicitation pour ce petit bijou

Nik … ? Les yeux dans le vague, j'étais déconnecté d'une réalité que je désirais fuir plus que tout. Mon cœur était une pierre, qui se détachait de ma poitrine,grain par grain, et mon corps était à présent celui d'un inconnu. Mes mains ne bougeaient plus, mes doigts ne se pliaient plus, mes yeux ne regardaient plus. Sous mes paupières abaissées, il n'y avait que son image, l'image d'un sourire, d'une étreinte, de la couleur de son regard. Que de choses que je ne verrais, que je ne vivrais plus. Plus jamais elle ne me conterait sa fierté et son amour, plus jamais elle ne me hurlerait dessus, réprimandant des bêtises que je recommencerais le lendemain, plus jamais elle ne se laisserait tomber sur le canapé en racontant une de ses idées lumineuses, ayant souvent trait à la décoration, plus jamais elle ne se pencherait sur mes devoirs pour m'aider à les réaliser. Elle n'était plus là et j'avais la sensation que son visage s'évanouissait déjà, gommé par le chagrin. Nik … je t'en prie … Je secouai la tête, puis m'effondrai. Mon dos se colla au mur, mes jambes me lâchèrent, ma tête dodelina. Et dans l'ombre des regards, les larmes roulèrent sur mes joues pâles alors que les sanglots m'étreignaient, violents.

Le portable sonnait, musique stridente et désagréable. Je savais pourtant qu'il me faudrait répondre, donner de mes nouvelles, assurer que je me portais bien. Mais quelque chose me retenait, une main invisible qui me broyait, qui annihilait toute volonté. Ma gorge était serrée, ma respiration sifflante, et la pluie brouillait un paysage délavé et sombre, duquel la lumière disparaissait. Mais était-ce mes larmes ou cette pluie diluvienne qui transformait ainsi ce que mes yeux voyaient ? Je secouai la tête, un rire me secoua, me prit, me posséda. Qu'étais-je devenu pour pleurer ainsi, sans honte, dans ce cimetière délavé par les années. Son nom luisait, près d'un second, gravé sur une pierre plus récente. Je glissai les doigts dans mes cheveux, les frottai violemment avant de laisser retomber mon bras. J'inspirai profondément en relevant mon visage vers le ciel. La pluie et les larmes se mêlèrent, mes lèvres se quittèrent, et un hurlement puissant s'échappa de ma gorge, illustration d'un chagrin de dément. Je hurlai jusqu'à ce que ma gorge ne fut broyée et que ma voix ne soit plus qu'un filet qui finit avalée par le silence. Ce n'était qu'un pas, un petit .. mais étrangement, je me sentais légèrement mieux. J'eus pourtant du mal à quitter les deux pierres, ces deux tombent qui renfermaient les souvenirs des deux êtres que j'avais aimé plus que tout, mais rentrer dans un foyer qui avait été le leur fut pire encore. Taciturne, je perdis cette joie de vivre à toute épreuve qui m'avait caractérisé, et mon côté sombre et détruit me poussa dans une voie que je n'avais imaginé auparavant. Et pourtant … quelques moments, quelques secondes jouissives réussissaient à me faire oublier ces visages qui me hantaient.

Sale con ! Je virai de bord, avec une dextérité dont je ne m'aurais cru capable, sans même appuyer sur le frein. Le dérapage qui suivit fut assourdissant et me secoua quelque peu, mais je raffermis la prise de mes doigts sur le volant et la boîte de vitesse, puis accélérai avant même que la voiture ne soit stable. La rue était sombre mais j'entrevoyais a voiture qui filait devant moi et que je n'étais prêt à laisser disparaître sans lui avoir fait payer sa manœuvre traîtresse. Je jouai du volant, de l'accélérateur, jusqu'à rattraper le dit filou. D'un coup bien maîtrisé, je lui fis une queue de poisson violente puis repris la tête de la course avec un cri guttural pour marquer ma victoire temporaire. Sa silhouette réapparut bien trop vite dans mon rétroviseur, au même moment que la ligne d'arrivée, à quelques dizaines de mètres. Mais alors que la victoire prenait forme dans mon esprit, un coup violent me fit dériver et je ne parvins à éviter le mur qu'à cause d'un coup de frein tout aussi brusque. Ma tête heurta le volant, une cuisante douleur envahit mon cerveau et des râles consécutifs s'échappèrent de ma gorge. A tâtons, je cherchai la poignée de ma portière et sortit en titubant, les mains plaqués sur la carcasse de mon automobile. Et à travers le voile ensanglanté qui brouillait ma vue, je le vis lui. Son bras se tendit vers moi, un rire le secoua. La colère m'envahit plus vite encore que la déception, et mes pas conduisirent mon poing à entrer en collision avec sa face de rat.

Inutile de te dire que tu exagères j'imagine? Je lui répondis d'un grognement, tandis qu'elle jouait de ses doigts agiles sur mon visage tuméfié. Je sais que la mort de maman … puis de grand-mère t'ont bouleversé mais je pense que tu dois réagir autrement qu'en rentrant à la maison en pièces détachées. Mon sourcil s'arqua tandis que mon regard s'attachait au sien, glacial. Je suis sérieuse Nik. Tu dois réagir. Je haussais les épaules, la poussant à s'éloigner et à disparaître de mon champs de vision. Mon regard fut attiré par la fenêtre, par le soleil qui luisait, par la silhouette d'un cimetière au loin. Je savais qu'Iseult avait raison tout comme j'avais conscience que je n'abandonnerais plus la course pour autant. C'était dans mon sang autant que dans ma tête à présent, la seule expiation d'une tristesse trop refoulée. Mais qu'est-ce que tu fais déjà …  ! Je vais m'engager. la coupai-je en me tournant vers elle. Elle se figea, les yeux incertains, puis sourit légèrement, tout autant avec tristesse qu'avec fierté. Je le lui rendis, confiant. J'avais à présent dix-huit ans, l'âge de déployer mes ailes, l'âge de quitter cette maison qui me rappelait trop de souvenirs, l'âge de tenter un rêve que j'avais longtemps caressé aux côtés de ma mère. Tu as intérêt à nous revenir entier. Crois tu que mon rôle de grand frère soit de te laisser vivre sans te pourrir la vie ? Quelque jours plus tard, j'étais partis. Voir mes deux sœurs secouaient leurs mains en tentant de retenir leurs larmes fut une image que je gravai dans mon cœur, et je ne cessai de leur écrire durant les quatre années qui suivirent. Seulement, je ne revins pas.

Le soleil frappait, presque indécemment, sur nos têtes dépourvus de couvre chefs. Les lunettes de soleil ne me protégeait que trop peu de la lumière, mais c'étaient les hurlements qui me perturbaient plus que cette chaleur, cette luminosité accrue. L'odeur métallique du sang envahissait mes narines empoussiérées, et seule la pénombre imposait par mes lunettes atténuaient l'horreur de la scène qui se déroulait sous mes yeux. Je les cherchais, mes doigts buttèrent sur mes joues mal rasées, arrachèrent le voile d'ombre, illuminèrent le tableau ensanglanté. J'entrouvris les lèvres et butai sur un rocher, la main autour de mon arme. Les bombes, tombées un peu plus tôt dans la journée, avait ravagé ce petit village niché dans la montagne, et les corps étaient nombreux, désertés par la vie, illustration d'une guerre aussi monstrueuse que réelle. Une main frappa mon dos, mais un murmure attira mon attention, loin de cet homme qui venait de m'apporter son soutien. Je repris mes esprits, guidé par cette voix, et enjambai les corps jusqu'à en trouver l'origine. Prisonnière d'un mort, la jeune femme qui, d'une voix éteinte, tentait désespérément d'attirer les secours, ne pouvait bouger, si ce n'est ses doigts qui griffaient le sol et la poussière. D'un geste vif, je fis rouler le corps, puis examinai le sien. Une balle lui avait perforé le flan et, ironiquement, seul le mort que je venais de retirer avait empêché la plaie de déverser sur le sol trop de son flux vital. D'une main assuré, je retirais ma veste puis déchirai un morceau de mon t-shirt sombre dans le but de lui confectionner un pansement rapide et destiné à tenir le temps que je la ramène près d'un médecin. Puis, je la soulevai dans mes bras, cherchant des yeux une aide qui pourrait m'être utile. Elle gémit à ce moment précis, les bras ballant, et je baissai la tête vers elle. C'était une européenne, qui s'exprimait en français, sans doute une journaliste, prise entre deux feux, qui avait sans doute perdu l'espoir de revoir son pays. Mon bébé … mon bébé … Je n'avais pas besoin d'être bilingue pour reconnaître ce terme, et mon regard terrifié fouilla les décombres. Et lorsque j'entrevis le panier, je compris immédiatement. A l'aide ! Mon hurlement les fit venir et le bébé fut rapidement extrait du panier. Par miracle, il respirait mais était clairement déshydraté. La mère chercha mon regard, puis sourit avec les yeux. Je crus lire un merci, juste avant qu'elle ne trépasse, ses faibles doigts refermés sur ma main glissée sous ses cuisses.

Tonton !! Une tornade blonde courut, puis se jeta dans mes bras. Je la soulevai avant de la faire voler dans les airs puis la ramenai contre mon torse avant de regarder son visage, un minois qui ressemblait de plus en plus à celui de sa mère. Tu m'as trop manqué ! Pourquoi tu es toujours si long ! Ses yeux verts se plissèrent et une jolie moue vint déformer sa frimousse de petite fille. Et bien, figure toi que ton oncle est un homme débordé.Tu dis toujours ça! Peut-être … mais cette fois-ci, je reviens pour de bon. Pour toujours ? J'acquiesçai avec un sourire. Le visage de la petite fille s'illumina et elle se débattit aussitôt en criant à tue tête qu'elle devait le dire à sa mère. J'éclatai de rire, la reposai, puis la laissai courir à toutes jambes pour rejoindre, ce qui était depuis six ans, son foyer. Cette petite représentait beaucoup à mes yeux et en vérité, je l'aimais comme si elle était ma propre fille. Je secouai la tête, entrai dans la cuisine, qui s'ouvrait sur l'extérieur, puis vins embrasser ma sœur, qui jonglait avec ses jumeaux de trois ans, tout aussi bruns que pouvait l'être leur parent, et le dîner. Ce n'est que bien plus tard, lorsque les enfants furent installés devant la télé et les adultes dans le jardin, que ma sœur revint sur ma mutation. Je n'osais plus y croire. Qu'est-ce qui t'a fait changer d'avis? Et bien … commençai-je impassible, je crois que j'ai fuit assez longtemps. Entre l'armée, les courses professionnelles puis le métier, il est peut-être temps que je me pose définitivement. On t'a proposé un poste à Chicago ? Comment as tu deviné? soufflai-je avec un sourire. Mon regard rejoignit celui de Gabrielle, qui de sa petite main gantée, telle une princesse Disney, me fit un signe joyeux. Tu sais que j'aime Gabrielle plus que tout … autant que mes propres enfants, mais je me demande souvent pourquoi tu ne l'as pas adopté. Surtout vu les circonstances dans lesquelles … Tu trouves que ma vie peut correspondre aux désirs d'une petite fille ? lui demandai-je en plongeant mon regard dans le sien. Et bien .. il ne tenait qu'à toi qu'il en soit autrement. Cette petite est bien plus heureuse avec toi qu'elle ne l'aurait jamais été avec moi. lui affirmai-je en me levant. Maintenant, excuse moi, je vais m'occuper de mes nièces et neveux. Je ponctuai ma phrase d'un clin d’œil puis rejoignis la fratrie. Je fus bientôt submergé par les trois enfants, qui se firent un point d'honneur de me faire ployer sous les rires et leurs jeux.

Ne vous ais-je pas déjà souligné votre conduite trop souple ? M'apostropha mon chef de sa voix tonitruante. Je retins un sourire face à l'ours qui se présentait devant moi, et, tout en rajustant le col de ma veste de cuir, je lui répondis avec ironie. Une bonne centaine de fois au moins, Monsieur. Ce qui ne vous empêche pas d'outrepasser les devoirs du conducteur, Hudlow. Je souris avec humour. J'ai tendance à oublier de regarder à combien je monte Monsieur. Vous aurez tout intérêt à regarder à présent Hudlow, car je vous assigne une coéquipière. Je haussai un sourcil curieux. J'avais souvent travaillé par équipe, mais jamais de façon permanente et restais, de ce fait, assez libre de mes mouvements. En revanche, je n'avais rien contre, si, et seulement si cette heureuse élue n'était pas de ces femmes trop coincées et moralisatrices. Je l'écoutai d'une oreille distraite, le suivant dans les méandres des couloirs jusqu'au bureau de cette dernière. La porte s'ouvrit sur une grande blonde, dont la chevelure ondulée, qui coulait sur ses épaules sveltes, atténuait quelque peu sa mine revêche. Nikolaas Je lui tendis une main franche, veillant à ne pas laisser transparaître mon intérêt par un sourire éloquent. Elle me toisait d'un œil vif, me décortiquant et me jugeant sans doute à la va vite. Ses paroles furent un bienvenu imprévisible et je ne sus m'empêcher d'éclater bruyamment de rire face à son entrée en matière, aussi directe qu'inattendue. Une tête brûlée … commentai-je amusé, j'adore les femmes qui ont du caractère … susurrai-je avec un certain mordant. Elle se révélait, en vérité, bien plus intéressante que je ne l'aurai cru au premier abord. Son regard était un trésor d'émotions qui se déchaînaient, et sa manière, bien à elle, de courir à chacune de mes remarques, piquait mon intérêt bien plus que je ne l'aurai cru.

La brune, étendue dans mon lit, ne me fascinait pas. En vérité, je n'étais pas bien sûr de la raison pour laquelle je l'avais entraîné ici. Peut-être parce que mon obsession pour une certaine blonde commençait à me taper sur le système, peut-être parce que j'avais cherché à la sortir de mes pensées quelques secondes, sans même y parvenir. La créature, une assistante ramassée au bureau suite à quelques sourires et quelques phrases, se mouva avec grâce entre les draps blanc, sans parvenir à m'émouvoir, ne serait-ce que quelques secondes. Sa main chercha la mienne, enserra mon poignet, tentant de m'attirer doucement vers elle pour reprendre, refaire, retenter, repartir. Je me dégageai légèrement, mais fermement, avant de souligner, sans gants aucun, que j'avais besoin de prendre une douche. L'eau gelée n'eut aucun effet sur moi, ni même sur mes pensées qui ne parvenaient à geler. Pourquoi étais-je attiré par une blonde aux remarques cinglantes et aux manières brusques ? Parce qu'elle m'amusait ? Me distrayait ? Me fascinait ? Je grognai en tapant contre le pommeau de douche et râlai profondément en voyant ce dernier se casser la gueule sur le sol, à mes pieds. Je sortis, les nerfs à vif, puis frottai mes cheveux bruns et humides à l'aide de la serviette bleue pâle. La sonnette retentit à ce moment précis, sans que je n'ai aucune idée de l'identité possible de mon visiteur. Toujours au bon moment râlai je en nouant négligemment la serviette autour de mes hanches. J'entrevis Callie dans l'entrée, entrouvrant la porte sans que je ne puisse voir le visage de l'importun. Son geste m'agaçait profondément, montrant un bien être qui la conduisait à se sentir chez elle, au point d'ouvrir la porte comme si elle était une amie officielle. Seulement, je ne m'attendais pas à ce que la personne qui soit en face d'elle soit justement la femme qui occupait chacune de mes pensées. Le son même de sa voix suffit à glacer mon sang dans mes veines, et sans que je ne me rende bien compte du chemin parcourut, je fus devant la porte, le regard ancré dans le sien. Je pâlis lorsque je remarquai ses yeux, qui allaient et venaient de Callie à moi, tout comme j'eus noté son teint verdâtre. Les mots me restèrent dans la gorge, coincé par je ne sais quel sentiment confus. Mais lorsqu'elle se retourna avant de s'en aller précipitamment, je réagis au quart de tour et la poursuivis, sans tenir compte de ma tenue. Hestia attend ! Elle ne se retourna pas, continuant sur sa lancée, et je grognais plus fort. Hes, écoute, ce n'est pas ce que tu crois ! J'avais retenu de justesse le « bon sang » qui avait menacé de quitter mes lèvres, à bon escient sans doute car elle se retourna enfin. Je ne savais pas bien quoi lui dire de plus, suite à ce mensonge éhonté, car en vérité, c'était exactement ce qu'elle croyait. Sa tirade me le confirma, mais, en fait, mes pensées concernant Callie me quittait à une vitesse ahurissante. Mes prunelles outremer s'attachaient à son visage, à ses boucles blondes qui auréolaient autour de son visage, à ses lèvres incarnates qui se mouvaient pour prononcer des mots qui n'avaient aucun sens. Et alors je compris. Je compris à quel point j'avais été le plus grand des abrutis, à quel point j'avais été atteint d'une cécité aberrante. J'étais tombé amoureux d'elle. Purement et simplement. Je me penchai, indifférent au fait qu'elle continuait à m'incriminer, et pressais ma bouche contre la sienne, en un geste de désir que je ne retins pas. Ses lèvres s'entrouvrirent, ma langue s'y glissa, et je l'embrassai à pleine bouche, comme je rêvai de le faire depuis déjà plusieurs semaines. Mais elle s'éloigna, les joues colorées, visiblement perturbée. Je compris ses paroles, les entendis. Mais, à présent que j'avais pris conscience de mes sentiments pour elle, le reste n'avait plus vraiment d'importance. Je glissai un bras sur sa hanche, tandis que ma seconde main venait se nicher sur sa nuque, amenant son visage à se rapprocher du mien avant de lui répondre d'un simple murmure grave. Quelques mots, qui sortirent de ma bouche, qui vint bientôt et de nouveau, rejoindre la sienne.

Elle me faisait chier, et elle le savait pertinemment. J'avais beaucoup de mal à garder mon sang froid lorsqu'elle était dans les parages, et encore moins lorsqu'elle me provoquait, certain d'avoir raison à propos de tout et de n'importe quoi. Je serrai les dents, fixant froidement au travers du pare brise la ville gelée qui s'étendait sous mes yeux. Je savais qu'il faisait froid à l'extérieur, mais l'habitacle, dans lequel nous étions tous deux confinés, était brûlant. L'air vibrait, confronté à deux personnalités qui étaient incapables de ne pas guerroyer. D'ordinaire, je parvenais à maintenir mon calme en un fragile équilibre entre colère et désir, mais tout avait explosé et s'éparpillait à présent dans tous les sens. De rage, j'appuyai fermement sur l'accélérateur, en une manœuvre qui m'était aussi familière qu'elle lui était inconnue, puis freinai brusquement à quelques centaines de mètres plus loin, lieu de rendez vous, en un dérapage contrôlé. La demoiselle était nettement moins d'accord avec moi, et sortit de la voiture en claquant la porte, un son sonore qui me fracassa le crâne, s'alliant ainsi, contre moi, à ses cris. Tu es un grand malade ! Toutes mes félicitations pour ça. commentai-je froidement. La discussion fut réduite à néant, par des bruits suspects, et chacun se réfugia dans la peau d'un professionnel. La discussion reprendrait certainement plus tard, et je rongeai mon frein, perturbé par ma colère. C'est alors que je le vis. Ma rage exacerbée céda la place à une peur, irrationnelle et soudaine, tandis que le canon du pistolet pointait dans sa direction. Vers elle … vers la femme sans laquelle je ne pouvais décemment survivre. Hestia ! C'était un cri de terreur, allié à une course folle. Je me jetai sur elle, presque inconsciemment, guidé par mon instinct. La douleur fut vive et, emporté par mon élan, je m'effondrai sur elle. Durant quelques secondes, quelques secondes uniques, je n'eus que son prénom aux lèvres, et la pensée qu'elle puisse être sauvée. Et cette souffrance qui se dispersait dans mon être ne parvenait à atténuer mon vif soulagement.

Les sons, les images, n'étaient qu'un brouillard épais dont je ne m’extrayais qu'avec difficulté. Ma gorge me brûlait, ma bouche était pâteuse, mais toute ma concentration allait à mes paupières, que je me forçai à ouvrir. J'en éprouvai une intense difficulté, car ces dernières, peu désireuses de m'obéir, semblaient coller à mes prunelles. Mes cils vinrent cependant caresser mes iris, et un blanc éclatant vint m'agresser, me forçant à les refermer quelques secondes. Il me fallut plusieurs minutes pour pouvoir m'habituer à un environnement dont je ne reconnaissais rien. J'inspirai profondément, mais je ne parvenais à bouger le moindre de mes muscles, écroué à mon matelas. Un râle parvint à s'échapper de ma gorge, attirant une jeune femme rousse auprès de moi. Mais ses traits ne me disaient rien, ni même … Je me sentis pâlir lorsque je compris que je n'avais aucune idée sur celui que je pouvais être. Je l'entendis parler, cette femme, mais seules mes pensées, atrocement sombres, m'intéressaient. Je cherchais à fouiller, à comprendre, sans parvenir à renverser les barrières imposées par mon cerveau. La panique m'envahit, mais je me concentrai à la refouler. Le médecin se présenta quelques secondes plus tard, afin de s'enquérir de mon état. J'ai besoin de savoir … Qui suis-je ? Ses traits se tendirent, ses mots se bousculèrent, mais après quelques termes bien médicales, il parvint à prononcer mon prénom. Nikolaas … Il n'évoquait rien pour moi, pas même un lointain souvenir enfouit. Afin de ne pas céder à la panique, je rejoignis du regard mes mains, cherchant à mouver mes doigts, un par un, jusqu'à ce que ma main ne rejoigne mon front, ne frotte ma tempe, bientôt accompagnée de la seconde. Je rouvris les yeux, juste à temps pour entrevoir une jeune femme entrer dans la pièce. Ses cheveux dorés se balançaient sur ses épaules et ses traits semblaient tirés. Une autre infirmière ? Mais ses paroles ne ressemblaient en rien aux explications bancales des médecins, et semblaient … intimes ? Sa bouche se pressa soudainement contre la mienne, sans que je ne réagisse, trop surpris par cette soudaine marque d'affection. Elle n'était qu'une inconnue, un visage sans souvenir. Elle recula et ses yeux, magnifiques, se voilèrent, toute joie effacée. En vérité, je fis à peine attention à sa question, ne songeant qu'à une seule et unique chose. Je … je ne sais pas qui vous êtes soufflai-je perturbé. Elle parut bouleversée mais … comment pouvais-je faire autrement ? Je ne savais rien d'elle, ni même de moi-même. Elle disparut et je restai seul. Mais bien que je n'eus aucun souvenir, elle resta près de moi, jour après jour, devenant ainsi le visage qui me servit de repaire parmi les innombrables. Je reçus pourtant de la visite, de celle qui prétendait être ma sœur, d'enfants qui pleuraient lorsqu'ils me voyaient, me perturbant ainsi davantage. Je me rendis vite compte que j'avais besoin de la jeune femme blonde, et ce, pour une raison qui m'échappait complètement.