PRÉNOM OU PSEUDO ◮ almostalways.
ÂGE ◮ 20 ans.
SEXE ◮ féminin.
Où AS-TU DÉCOUVERT LE FORUM ? ◮ sur prd.
QU'EN PENSES-TU ? ◮ il est sublime.
FRÉQUENCE DE CONNECTIONS ◮ 5/7.
MOT DE LA FIN ◮ omn rocks !.

Aujourd'hui, mon psychologue m'avait inscrite à un genre de thérapie en groupe. Il s'agissait de personnes ayant vécu des traumatismes différents qui se rassemblaient afin d'extérioriser tout ça. Je trouvais ça incroyablement stupide. Je n'avais pas besoin d'extérioriser quoi que ce soit, j'allais bien. J'étais suivie par mon psy depuis que j'avais seize ans, je tenais le coup, j'avais fait mon deuil, je ne faisais pas partie de ces gens qui se morfondent sans arrêt. Je souriais. Tout le temps. J'étais de ces filles qui passent leurs journées à répandre la joie autour d'elle, j'étais une boule d'énergie et de lumière. J'étais Birdy Lola Baldwin et j'étais un soleil, je ne me voyais pas parler de la mort de mon bébé à qui que ce soit et pourtant, j'étais bien forcée de le faire. Contrairement à ce que l'on peut croire à première vue, je ne suis pas la plus solide des femmes Baldwin. Avant de partir, mon père m'avait fait promettre qu'une seule chose dans toute ma vie, je l'entends encore comme si c'était hier : " Reste toujours forte, ma chérie, je t'en prie." Et voilà où j'en suis.. Devant des gens, une dizaine de personnes, toutes différentes mais qui ont un point commun : leur vie fout le camp. À présent, ils tournent tous leur regard vers moi. C'est à mon tour, je dois parler, je dois cracher ce venin avant qu'il ne m'empoisonne, je prends alors une grande respiration et commence :

- Elle est partie.. Le 13 juillet 2006. Je m'en souviens comme si c'était hier. Je l’avais porté pendant 5 mois dans mon petit bedon et elle avait fini par disparaitre avant même que je n’ai le temps de la voir, ni même de m’en rendre compte.. En effet, j’ai fait un déni de grossesse et on ne s’est aperçu de sa présence dans mon ventre seulement deux jours avant sa mort. Je m’en veux de ne pas avoir su la protéger et lui faire découvrir le monde. Et je m’en veux aussi de ne jamais avoir rien dit à Blaze,son père.. J’avais eu des douleurs atroces à l’estomac cette nuit-là et ma mère avait donc décidé de m’emmener à l’hôpital, je pensais juste qu’elle faisait des siennes.. On m’a fait passé des examens, on a regardé l’échographie.. Quand les médecins sont revenus avec ma mère en pleurs, je n'ai pas voulu comprendre puis ils ont fini par le dire : votre bébé est mort. J’ai été obligé d’accoucher de ma fille morte et, ça reste le pire moment de toute mon existence.. Après, c'est le vide, le néant, l'ombre de ma vie.

J'avais tout déballé, toute l'histoire, celle que j 'avais même pas osée expliquer à mon psy. Je ne pleurais pas. J'avais réussi à me forger une carapace de fille souriante, enjouée et optimiste. Ils me regardèrent tous avec de grands yeux, certains avaient des larmes qui dégringolaient sur leur joue, je crois qu'il attendait une suite, mon ressenti, mon humanité, je repris alors :

- Alors oui, comme vous tous, je me suis cassée.. Parce qu’elle est partie au loin, trop tôt. Elle a pris ses petites ailes et a stoppé son envol sur un nuage. Trop loin. Oui, elle me manque, même si je l’ai pas réellement connue..

Je m'essouffle. Depuis combien de temps déjà est ce que je dérive? Je me suis perdue dans cette rue, dans cette nuit noire qui m'a engloutie. Tel un morceau de porcelaine, trop blanc, trop fragile. Je me suis cassée. Je flotte dans cette pénombre qui me transporte. Je n'avance pas vraiment. Je ne sais plus qui je suis. Une jeune fille qui devait sourire, une fille remplie de bonheur, d'amour. À quoi est ce que je ressemble maintenant ? Une enveloppe remplie de larmes, un petit tas d'atomes brisés par le chagrin qui se cache parce qu'elle a peur d'être brisée. À nouveau. Dans le genre pathétique, on ne fait pas mieux. Soudain, une petite voix se fait entendre. La gamine qui me parle ne doit pas avoir plus de dix ans et alors qu'elle me pose une question, je me demande ce qui a bien pu lui arriver.

- Mais.. Vous en avez parlé à quelqu'un au moins ? Je veux dire.. Avant nous. Vous avez quelqu'un pour vous soutenir ?

Si j'avais quelqu'un pour me soutenir ? Je n'ai que ça, des gens extra-ordinaires qui me veulent du bien : Cléo, maman, Ezra.. Surtout Ezra. C'est mon meilleur ami. Enfin, non, c'est n'importe quoi cette étiquette du meilleur ami, il est bien plus que ça : il est ma lumière, mon ange gardien et mon guide mais aussi mon amant. Il est le seul à qui j'ai déjà parlé de la mort de ma fille, le seul qui m'a toujours soutenu et épaulé. Avant qu'il arrive, j'étais un tas de chairs qui errait dans les rues puis il est arrivé. J'avais treize ans et sa petite main dans la mienne a été ma bouée de sauvetage. C'est grâce à lui si je suis si forte aujourd'hui.

- Oui. J'ai quelqu'un. Il s'appelle Ezraël Andrea Del Moro et croyez-moi.. Il va changer le monde.