01. depuis combien de temps vis-tu à Chicago ? Je suis né à Chicago, donc j’y vis depuis vingt-quatre ans. J’ai grandis dans un petit appartement situé au-dessus du restaurant familial. Je n’ai pas à me plaindre, certes, l’appartement est très petit pour accueillir cinq enfants et des parents, c’est pour cette raison que récemment, j’ai pris mon propre appartement l’étage au-dessus de celui de ma famille. Ainsi, je peux rester présent pour eux – car en gérant un restaurant, mes parents ont du mal à s’occuper de la cadette de huit ans, mais je peux aussi avoir un peu d’indépendance. Après tout, j’ai 23 ans.  02. Que penses-tu de la ville ? J’adore cette ville. C’est un peu comme si c’était mon propre territoire, je la connais comme ma poche. Je ne viendrais pas à dire que j’en connais les moindres recoins, mais c’est presque le cas. La nuit, c’est un endroit qui bouge bien. J’adore passer dans le quartier de l’université pour boire des verres avec les étudiants, ça me donne presque l’impression d’en être un. Le voisinage où je vis est plutôt sympathique, je connais la majorité du quartier grâce au restaurant.   03. Quel genre d’adolescent étais-tu ?   J’ai bien conscience que je n’étais pas très facile à l’adolescence. J’étais assez influençable et lorsque j’ai commencé à traîner avec cette bande de mec, je me suis laisser entraîner dans des trucs pas net. J’en faisais voir de toutes les couleurs à mes parents, surtout qu’en étant l’ainé de la famille, je me devais de montrer l’exemple, ce qui n’était pas trop le cas lorsque j’avais dix-sept ans. Je n’étais pas très bon élève sauf dans le cours de littérature, j’adorais ce cours, j’étais un des meilleurs de la classe, même si je me gardais bien de le dire. Il m’arrivait très souvent de m’enfermer dans ma chambre afin d’avoir un peu de paix pour écrire. On a tous été dans l’âge bête non ? Eh bien moi, c’était exactement ça. J’étais grossier, solitaire et j’étais souvent dans la lune. Il n’y avait qu’avec ma petite sœur Emilia, la cadette, avec qui j’agissais différemment. Heureusement, maintenant, je me suis bien calmé.   04. As-tu eu une belle enfance ?   Je n’ai pas à me plaindre de ce côté-là. Nous ne sommes pas les personnes les plus riches de la planète, mais justement, je crois que c’est ce qui soudait la famille. Depuis l’arrivée de mes frères et sœurs, je n’ai jamais eu des minutes de répits. Etant l’ainé de la famille, je me devais d’aider mes parents à leur éducation. Cela se faisait toujours dans les rires et la bonne humeur. Nous avons toujours été une famille très soudée, chacun se devant de donner un coup de main pour le restaurant de la famille. Oui, j’ai eu une très belle enfance, nous n’avons jamais manqué de rien grâce aux efforts de mes parents afin de nous rendre heureux. Bien sûr, dans une famille de six enfants, il y a toujours des disputes, des tensions, mais jamais rien de sérieux pour nous détruire. Je pense que j’ai toujours dépendu de ma famille depuis mon plus jeune âge, ils sont ce qui m’apporte sans cesse de la bonne humeur. Surtout Emilia, la cadette avec qui je suis très proche qui est un véritable rayon de soleil ambulant.  05. Si tu devais te décrire en cinq mots lesquels choisirais-tu, pourquoi ?   Tout d’abord, je mettrais le mot « rêveur ». Je dois avouer que je suis très souvent dans la lune, partir dans les abysses de ma pensée et surtout de mes rêves, j’ai l’impression de faire une pause avec tout ce qui se passe autour de moi et cela me fait du bien. Ensuite, les deux mots suivant seraient « débrouillard » et « bricoleur ». J’ai toujours appris à ne dépendre que de moi-même lorsque j’ai des problèmes et lorsque je ne passe pas mon temps à lire ou à écrire, j’adore bricoler avec mes deux frères. Dernièrement, on a trouvé des motocross à la décharge et on compte bien les remettre sur pied afin de s’en servir. Le mot suivant serait « curieux ». J’avoue que je mets mon nez un peu partout, certaines personnes disent que c’est un défaut et d’autres une qualité. Il m’arrive très souvent de me mêler de ce qui ne me regarde pas, ce qui m’attire parfois des problèmes. Et enfin, le mot « protecteur » arrive en cinquième place, car je ne peux m’empêcher de protéger les gens de mon entourage, surtout mes petites sœurs et mes petits frères.   06. Aimes-tu ta profession  ?   J’aime ce que je fais. Cela me permet de rencontrer énormément de gens et surtout, on commence à avoir des habitués avec qui j’adore parler pendant que je leur fais le service. De plus, j’adore cuisiner et mon père m’apprend depuis que je suis plus jeune les plats typique du Mexique. Parfois, il m’arrive de faire mes propres trucs et de les faire goûter aux clients, la majorité du temps, ça passe. Et puis, c’est toujours un plaisir de travailler avec toute la famille qui met la main la pâte.   △ Comment qualifierais-tu ta vie amoureuse en ce moment  ?   Vide. Enfin… Disons qu’elle n’est pas si vide que cela, mais elle est sans espoir. Il y a cette fille qui viens souvent au restaurant, elle habite dans l’appartement d’à côté avec ses sœurs je crois, en tout cas, elle est souvent là avec la plus vieille. Elle m’intrigue. Mais c’est perdu d’avance, elle doit avoir quoi ? 18 ans ? C’est  complètement dingue de s’intéresser à quelqu’un de si jeune, j’ai l’impression d’être rien de plus qu’un vieux pervers parce qu’elle m’obsède. C’est horrible, il faut toujours que je la vois. J’ai même calculé les heures à laquelle elle rentre de cours pour la croiser « par hasard » dans la cage d’escalier. On ne se dit que « bonjour » et « au revoir », mais pourtant, c’est le meilleur moment de la journée. Je n’ose pas lui parler plus, elle a l’air très réservée, je ne sais pas pourquoi, mais je lui laisse de la distance. Mais je dois l’avouer, je fais des recherches sur elle, c’est complètement débile voire carrément puéril, mais elle m’obsède tellement que j’ai besoin d’en savoir plus à son sujet.   07. Quelles sont tes plus grands rêves  ?   J’ai seulement deux rêves. Le premier serait d’aller à Cancun, la ville d’origine de mon père. Nous n’avons pas assez d’argent pour envoyer toute la famille là-bas, mais je rêve d’y mettre les pieds et de découvrir d’où viens la famille, voir le Mexique, découvrir tous ses secrets. J’économise depuis quelques temps pour réaliser ce rêve. Et puis, le second serait de faire des études à l’université de Chicago et me spécialiser dans la littérature. Je rêverais de devenir professeur voir auteur à mes heures perdues, cependant, le travail au restaurant prend tout mon temps et je n’aurais jamais les moyens de financer des études. De plus, je doute avoir le niveau requis pour faire de telles études.  08. Parles nous un peu plus amplement de tes goûts, ce que tu aimes ou pas faire.    Je pense déjà que vous l’aurez compris, j’adore la littérature. Dans mon nouvel appartement, j’ai une simple pièce où j’ai monté moi-même une bibliothèque afin de rassembler tous les romans que j’ai dévorés. Je rêve de faire une bibliothèque sur les quatre murs. J’adore la musique, je travaille très souvent en cuisine avec la radio allumée pendant que mes sœurs s’amusent à danser en rythme. Dans la famille, on passe notre temps à danser, ce sont nos parents qui nous ont transmis la culture d’Amérique latine et ainsi, j’adore danser. Je sais danser la salsa cubaine, mais aussi portoricaine ainsi que les danses de salon, cependant, j’espère un jour savoir danser le tango. Par contre, j’avoue que je n’aime pas faire le ménage ou ce genre de tâches ménagères. Je remets très souvent cela au lendemain. Comme tout homme de mon âge, j’aime la présence des femmes, j’ai bien conscience que certaines cherchent à attirer mon attention au restaurant, mais je n’arrive pas à les trouver aussi intéressantes que ma voisine, c’est plus fort que moi. 09. Si tu pouvais changer une seule et unique chose dans ta vie, laquelle serait-ce ?    Sûrement cette période sombre de mon adolescence. L’addiction à la drogue et tout ça. J’ai fait des choses dont je ne suis absolument pas fier. J’aimerais tellement changer cette partie-là de ma vie, montrer plus de caractère auprès des personnes qui m’ont entrainé là-dedans. Je regrette aussi de ne pas m’être donné à cent pour cent à l’école, je me répète sans cesse que si je me serais donné les moyens de réussir, je serais peut-être étudiant et je pourrais être professeur. Mais je sais que tout cela, c’est passé, je ne peux rien y changer malheureusement.  10. Comment vois-tu ta vie dans dix ans ?   Je ne sais pas trop. Ce qui est certain, c’est que je travaillerais encore au restaurant. Sinon, peut-être que dans dix ans, j’aurais été capable d’écrire un roman qui vaut quelque chose et je serais publié. Je ne m’attendrais pas à la célébrité, mais juste avoir le privilège d’être publié. Je pense qu’à ce moment-là, j’aurais une femme et peut-être un garçon. Oui, j’aimerais bien avoir un garçon, je lui transmettrais les valeurs de notre famille, je lui apprendrais à cuisiner et à se débrouiller tout seul. Dans dix ans, je me vois continuer une petite vie simple et tranquille.